Alors que Le Parisien publie aujourd’hui une double-page sur « l’incroyable gâchis » de l’hôpital de Poissy (Yvelines), objet d’une enquête du parquet de Versailles, le député-maire de Chambourcy, Pierre Morange (UMP), vice-président de la Commission des affaires sociales, répond à Egora.fr.  La guerre est ouverte entre Claude Evin, président de l’Agence régionale de santé Ile-de-France et près d’un millier d’élus locaux, menés par le député, depuis la décision de l’ARS, fin février, de «mettre fin à la procédure » qui visait à la construction d’un nouvel établissement à Chambourcy.

Egora.fr : Vous dénoncez, dans la gestion du centre hospitalier intercommunal de Poissy-Saint Germain un scandale couvert par des mensonges d’Etat et des violations du code des marchés publics. Qu’en est-il exactement ?

Pierre Morange : Je ne fais que répéter ce que dit le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales qui a saisi le procureur en juin 2009, au titre de l’article 40. Il avait été stupéfait par une telle incompétence, qu’il n’avait jamais vue en trente années d’exercice professionnel. Il revenait à la justice de voir quel était le degré d’intentionnalité de la violation des marchés publics. Jean Mallot (co-président PS de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, Meccs) et moi-même, nous avons interpellé le gouvernement et toutes les autorités compétentes à plusieurs reprises, sans jamais avoir de réponse sur ces questions précises. C’est la raison pour laquelle ces questions, restées sans réponse, sont désormais portées à la connaissance du public.

Avez-vous des exemples de violation du code des marchés publics ?

Cela concerne les 19 marchés publics, qui sont considérés comme viciés, et au moins les 15 les plus importants. Ainsi les transports sanitaires et les sociétés de nettoyage ont-ils par exemple été renouvelés en violation complète du code des marchés publics, en publicité notoirement insuffisante de l’appel d’offres et en violation du cahier des charges. Tout ce qui définit le code de marchés publics et le respect des règles de concurrence n’a pas été respecté. Cela aboutit à des mécanismes de surfacturation, c’est-à-dire à un gâchis d’argent public et à un mépris des efforts des Français. En plus, quand cela a vocation à mettre en œuvre les établissements de soins et la santé, le sujet le plus essentiel en ce bas-monde, c’est un véritable scandale ! C’est insupportable d’incompétence, insupportable de mépris vis-à-vis de la santé de nos concitoyens et vis-à-vis du respect des Français. Sur les trente dernières années, cela représente plusieurs millions, voire plusieurs dizaines de millions d’euros.

Ces graves dysfonctionnements que vous mettez en avant vous permettent également d’appuyer votre demande de construction de l’hôpital de Chambourcy. Où est-on dans ce projet?

Ce projet n’est pas mon projet, c’est le projet du gouvernement ! Le gouvernement doit faire la démonstration de sa cohérence. C’est le gouvernement qui a donné l’ordre de construire un  hôpital à Chambourcy en lieu et place des hôpitaux de Poissy et Saint-Germain en Laye. C’est le gouvernement qui a donné l’ordre que cet hôpital soit un hôpital de 834 lits, en lieu et place des 1200 lits existants. Notez bien que c’est 834, pas 830 ou 850…  C’est un projet forcément réfléchi. Alors que l’ARS nous affirme que ce projet n’a pas été pensé, a été mal calibré. C’est une démonstration de mépris complet des citoyens qui vise à les prendre pour des sots. Maintenant l’Etat et le gouvernement doivent tenir leurs engagements pour mettre en œuvre ce projet stratégique majeur. 

Ne craignez-vous pas qu’on vous accuse d’évoquer ces scandales pour favoriser l’émergence de l’hôpital dans votre commune, alors que faites circuler une pétition depuis plusieurs semaines ?

Cette pétition est signée par plus de 1 000 élus, de droite, de gauche, du centre et d’ailleurs, et par six parlementaires de tous bords. Moi je n’ai rien demandé, j’ai reçu un ordre de l’Etat. Le médecin que je suis, vice-président de la commission des affaires sociales qui a quand même quelques lueurs sur le sujet, en a pris acte et a facilité l’action à la demande de l’Etat et à la demande des maires. Ce n’est pas pour moi un enjeu d’une quelconque tactique politique, mais en tant que représentant du peuple français, j’ai à cœur de défendre ses intérêts. Compte tenu d’une dette conséquente liée à une incapacité de ce même Etat de faire respecter le code des marchés publics, il a décidé de passer de deux hôpitaux à un seul hôpital pour faire des économies. Dire que c’est une espèce d’enjeu politique, c’est émettre  une sorte d’écran de fumée pour masquer son irresponsabilité et son incompétence.

Où en-est-on aujourd’hui ?

Nous sommes dans le cadre d’un supposé réexamen pour un projet médical d’établissement, qui est supposé de ne pas avoir été fait… Que l’on ait besoin de réexaminer le sujet, pourquoi pas. Pour le reste, il nous faut une décision très rapidement. Le ministre Xavier Bertrand a affirmé courant février dans les colonnes du Parisien (Yvelines) que le projet de Chambourcy n’était pas enterré et que concernant l’argumentaire de Monsieur Evin, il a répliqué que la construction coûterait moins cher que la rénovation. Je tiens aussi à rétablir la vérité : le directeur général, Gilbert Chodorge, a été remercié et démissionné d’office et de force. J’ai les écrits. Nous exigeons la vérité sur la violation des marchés publics, sur les procédures judiciaires, sur les sanctions administratives à prendre en compte et sur les équipements à mettre au service de la santé de nos concitoyens.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Gaëlle Desgrées du Loû