Cet après midi, les sénateurs ont commencé à examiner en séance publique, le projet de révision des lois de bioéthique, préalablement adopté par les députés.

S’exprimant dans l’hémicycle à l’ouverture des débats, Nora Berra, la secrétaire d’Etat à la Santé, a rappelé les principales orientations initiales du gouvernement alors que plusieurs amendements déposés en commissions des affaires sociales avaient emprunté une voie divergente. Et parfois très différente de celle suivie par l’Assemblée nationale.

Il en va ainsi de la clause de révision de la loi. Le projet de loi supprime la clause de révision tous les cinq ans et instaure à la place, l’instauration d’une procédure de veille et de suivi, et l’organisation des débats publics autour des questions soulevées. « Une clause de révision figerait à l’inverse toute adaptation et toute évolution des textes. Sa suppression est pleinement justifiée », a déclaré la ministre alors que l’Assemblée nationale venait, en première lecture de réintroduire la clause périodique de révision de la loi, contre l’avis du gouvernement.

Autre point litigieux : la levée de l’anonymat du donneur de gamètes. Le projet initial comportait une mesure de levée de l’anonymat, en prévoyant que l’enfant pouvait accéder à l’identité du donneur, à sa majorité, sous réserve du consentement de ce dernier. L’Assemblée nationale a supprimé ces dispositions que la ministre demande maintenant au Sénat de rétablir, dans le cadre du débat public. En commission, les sénateurs ont en effet rétabli la levée de l’anonymat, mais partiellement, sans prévoir le consentement du donneur , implicite pour lui. « Quel sera l’impact sur les dons de gamètes ? Et sur les parents ? Ne seront-ils pas tentés de taire aux enfants leur mode de conception ? », s’est interrogée la ministre en faisant également remarquer que les enfants nés après 2014 seraient exclus du bénéfice de la mesure. « Pour remédier à la souffrance des uns, on risque d’attiser celle des autres », a-t-elle fait valoir.

Nora Berra est par ailleurs demeurée très ferme sur le refus gouvernemental de la légalisation de la GPA (gestation pour autrui). Trois raisons ont été mises en avant : l’« incompatibilité » avec le respect de la dignité humaine, le fait qu’elle « porte atteinte au principe d’indisponibilité du corps humain », et qu’elle ouvre, enfin, « inéluctablement la voie à la marchandisation du corps humain ». Pour la ministre, « autoriser la GPA ouvrirait une brèche dangereuse », en débouchant inéluctablement  sur l’autorisation de la rémunération des mères porteuses, « au motif d’encadrer les pratiques de fait ». « Devons nous, parce qu’une technique est disponible et parce qu’elle a fait l’objet d’une demande sociale, y faire nécessairement droit ? » s’est-elle interrogée.

L’interrogation serait de même nature s’agissant du transfert d’embryons post- mortem, accepté par amendement à l’Assemblée nationale, repoussé en commission des affaires sociales du Sénat. « La souffrance ne peut être créatrice de droits », a insisté la secrétaire d’Etat pour justifier le refus du gouvernement d’autoriser ce transfert.

Même refus concernant  la libéralisation de la recherche sur l’embryon. La commission sénatoriale a souhaité passer du régime d’interdiction assorti de dérogations à un régime d’autorisation dans un cadre strict. « Le gouvernement souhaite maintenir le régime d’interdiction actuel assorti de dérogations », a expliqué Nora Berra, un choix de continuité avec les lois de 1994 et 2004 « et de cohérence avec l’ensemble des dispositions relatives à l’embryon, qui visent à garantir la protection de l’embryon ». Un choix, selon la ministre, « qui n’a pas pénalisé la recherche française ».

La ministre est revenue par ailleurs sur la polémique suscitée par ses propos justifiant le fait que les hommes homosexuels devaient être exclus du don de sang et d’organes, en fonction d’un « risque sanitaire avéré ». « Il ne s’agissait pas d’exclusion, mais de contre-indication », s’est justifiée la ministre qui a rappelé que les homosexuels masculins sont parmi les premières victimes du VIH-Sida, avec un nombre de nouvelles infections VIH environ 200 fois supérieur à celui de la population française. « Mais c’est bien la notion de comportement ou de situations « à risques » qui doit être prise en compte comme facteur d’exposition au risque du VIH, et non pas évidemment, le fait d’être homosexuel », a précisé Nora Berra.  En regard de son passé médical auprès des malades du Sida, la ministre a considéré que les accusations d’homophobie portées contre elle étaient « particulièrement offensantes ».

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne