« La solution proposée par le laboratoire Servier peut avoir de l’intérêt à condition qu’elle soit purgée de ses vices ». Pour Christian Saout, le président du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), la proposition faite par le laboratoire Servier de constitution d’un fonds d’indemnisation spécialement dédié pour les victimes dont le taux d’incapacité ( de 5 à 24 %) est inférieur à celui exigé pour accéder au mécanisme de droit commun prévu par l’Oniam (Office national d’indemnisation des accidents médicaux) est inacceptable.

Trois points posent problème au collectif représentant les patients, qui réagissait cet après-midi aux côtés de l’Association française des diabétiques (AFD) à la réunion qui s’est tenue ce matin avec Claire Favre, missionnée par ministère de la Santé sur l’indemnisation des victimes du Mediator : le renoncement de la victime à aller devant le juge pour l’indemnisation du reste des préjudices éventuels, les conditions dans lesquelles le barème d’indemnisation va être fixé ( avec notamment le choix des experts) et le fait que le laboratoire demande à gérer seul et directement ce fonds. « Or nous sommes dans un scandale sanitaire et la gestion doit se faire avec des particuliers, avec des associations de victimes et avec l’Etat », souligne Christian Saout.

Pour les victimes dont le taux d’incapacité est supérieur à 24 %, il doit être créé un fonds spécifique, qui doit être géré par l’Oniam, plaide le Ciss. Alors que ses représentants seront entendus jeudi par la mission parlementaire à l’Assemblée nationale, Christian Saout n’exclut pas de proposer un amendement créant ce fonds, et qui serait discuté début avril par les députés dans le cadre de l’adoption de la proposition de loi Fourcade. « Cela doit se faire dans le véhicule législatif le plus proche car il serait moralement inacceptable que les victimes les moins graves soient indemnisées rapidement dans un « fonds Servier » tandis que celles dont les atteintes sont les plus lourdes doivent attendre encore longtemps la création du fonds public », martèlent le Ciss et l’AFD. Souhaitant que « tous les responsables potentiels alimentent ce dispositif », Christian Saout souligne néanmoins que « personne ne peut contraindre le laboratoire Servier  à mettre 400 ou 500 millions d’euros dans ce fonds,  mais s’il souhaite se grandir face au scandale qui le disqualifie, il doit consigner volontairement les sommes pour l’indemnisation et le fonctionnement de ce fonds public idéalement confié à l’Oniam ». Selon le président du Ciss, le laboratoire aurait provisionné 90 millions d’euros en 2008, 230 millions en 2009 et entre 400 et 500 millions d’euros en 2010.

Le Ciss et l’AFD  appellent l’Etat à « se prononcer clairement sur la façon dont il va aussi contribuer au financement de ce fonds en raison des dysfonctionnements relevés par l’Igas et qui de fait l’engage ». Alors que dans le Journal du Dimanche, hier, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand a demandé au laboratoire Servier d’indemniser intégralement les victimes, en le sommant de présenter une proposition définitive d’ici la fin de la semaine, le groupe pharmaceutique a indiqué qu’il refusait d’assumer l’ensemble des préjudices financiers, la responsabilité étant partagée selon lui entre lui-même et l’Etat.

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Auteur : Gaëlle Desgrées du Loû