Le vote solennel du projet de loi sur la bioéthique au eu lieu cet après-midi, à 16 h 30, caractérisé par un clivage net entre l’opposition et la majorité, à la différence des précédents scrutins sur un sujet qui était censé transcender les votes partisans. Sur les 547 votants et 482 suffrages exprimés, 272 députés ont voté pour et 216 contre. « Nous avons en commun certaines valeurs comme le respect de la dignité de la personne humaine et la non marchandisation du corps », a souligné Alain Claeys (PS), dont le groupe a voté contre. « Là où il y a désaccord entre nous, c’est que la majorité a choisi, pour la recherche sur l’embryon,  une formule interdiction avec dérogation. Cette formule est une formule de tous les dangers. Nous nous sommes rendu compte qu’au sein de votre groupe, vous aviez deux interprétations différentes, pour les uns, c’était avant tout les interdictions qui primaient, et de l’autre côté l’interdiction avec dérogation avait la volonté de protéger l’embryon. Mais il n’y a en réalité aucune protection car la transgression a lieu avant, sur les embryons surnuméraires voués de toute façon à la destruction », a-t-il souligné, en appelant à autoriser les recherches sur les cellules souches embryonnaires et « en finir avec l’obscurantisme ».

« Nous avons le sentiment d’avoir assisté à une occasion manquée, à un grand gâchis qui mène à un statu quo et ce statu quo vaut recul, voire carcan », a déclaré Noël Mamère (Verts), regrettant que le périmètre « ait été si limité » et que ce texte ait été « prisonnier de la biomédecine », « en manquant l’occasion d’insérer les questions de bioéthique dans l’évolution de la société », sur l’aide médicale à la procréation, la recherche, la gestation pour autrui et l’euthanasie notamment. L’opposition a dénoncé le statu quo sur la question de la recherche sur les embryons et sur les cellules souches embryonnaires et sur celle de l’ouverture de l’aide médicale à la procréation aux couples homosexuels notamment. Ainsi est maintenue l’interdiction de principe des recherches, tout en permettant des dérogations très encadrées. Ainsi l’AMP reste-t-elle considérée comme une réponse médicale à une infertilité naturelle. « Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué », indique le texte.

Le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, a au contraire souligné le caractère « équilibré » de ce projet de loi quand le rapporteur Jean Leonetti (UMP) a mis en avant les nouveautés de ce texte, considérées comme des « avancées ».

Ainsi au terme des débats, les parlementaires ont adopté un texte qui autorise le don croisé d’organes entre personnes vivantes, autorise la vitrification des ovocytes (technique de congélation ultra-rapide), supprime la condition de deux ans de vie commune pour les couples qui demandent une AMP et ouvre la possibilité aux femmes nullipares de donner leurs ovocytes et aux hommes n’ayant pas eu d’enfant de donner leurs spermatozoïdes.  Contre l’avis du gouvernement, les députés ont approuvé le transfert d’embryon après la mort du géniteur, à condition d’un consentement préalable du père et de l’existence d’un projet parental dans le cadre d’une AMP. Un amendement a été adopté pour limiter le nombre d’embryons conçus « à ce qui est strictement nécessaire à la réussite de l’assistance médicale à la procréation, compte tenu du procédé mis en œuvre », après le rejet de la proposition du député Olivier Jardé (UMP) qui souhaitait limiter à trois ce nombre d’embryons. S’agissant du diagnostic prénatal, ayant pour but de détecter in utero chez l’embryon ou le fœtus une affection d’une particulière gravité, le gouvernement devra remettre dans un délai d’un an, à compter de la publication de la loi, un rapport au Parlement sur les pistes de financement notamment public, et de promotion de la recherche médicale pour le traitement de la trisomie 21.

Le principe de l’anonymat du don de gamètes est finalement maintenu, alors que pour défendre ce principe, le rapporteur UMP Jean Leonetti avait évoqué les risques du choix d’un donneur « sur catalogue ».