La caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) et la Mutualité française vont porter plainte contre les laboratoires Servier pour « escroquerie et tromperie aggravée » auprès du procureur de Paris. Fruit d’une concertation entre les deux organismes, la plainte devrait être déposée « dans les jours qui viennent » pour la Mutualité, rapporte l’Afim, sa lettre web et d’ici une quinzaine de jours pour la Cnam.

Si le délit de « tromperie aggravée » est avéré, la Cnam compte demander le remboursement des frais engagés à partir de la date juridiquement déterminée où le Mediator aurait dû être déremboursé.  Pour l’assurance maladie obligatoire seule, à raison de 10 000 euros remboursés en moyenne par patient victime d’une valvulopathie, des millions de boîtes de médicaments remboursées de manière indue et du coût des traitements de masse consécutifs au rappel des patients, la facture pourrait s’élever à 20 millions d’euros par an, selon des projections effectuées par la Caisse natinale, dans un document adressé le 25 janvier au Conseil de la Cnam par son président Michel Régereau. 

En outre, l’assurance maladie a décidé de mener des recours contre tiers. Un dispositif d’alerte sera mis en place pour suivre les dépôts de plainte, de manière à ce qu’à l’issue des procédures pénales et civiles individuelles engagées par les patients, les montants récupérables à terme puissent être déterminés en fonction du niveau d’imputabilité reconnu par les tribunaux. En cas d’omission de déclaration par le tiers responsables, au cas où un accord amiable entre le plaignant et le laboratoire serait intervenu,  le montant de l’amende prévue dans ce cas serait significativement augmenté. Le ministre, Xavier Bertrand, a été saisi de cette demande par le président de la Cnam.

S’agissant des mutuelles, d’après Le Monde, le Mediator aurait été à l’origine, sur la dernière décennie,  d’un manque à gagner de l’ordre de 100 millions d’euros.

Les plaintes de ces deux poids lourds vont donc rejoindre les 176 autres plaintes déjà déposées en janvier par des victimes ou familles de victimes, ainsi que par des associations, tels  l’UFC-Que choisir et l’Association française des diabétiques (AFD). Pour nombre d’entre elles, les plaintes ont été déposées pour « blessures et homicides involontaires », une voie qui ne semble pas la plus judicieuse pour Claude Marin, le procureur de Paris. Il faut en effet « prouver au cas par cas, le lien de causalité entre la maladie et la prise du médicament (…) et c’est difficile à établir », explique-t-il au Monde en justifiant, par l’aspect « tentaculaire » de l’affaire, sa probable décision d’ouvrir prochainement une information judiciaire. Une décision qui entraînera la désignation d’un ou plusieurs juges indépendants, amenés à enquêter sur le dossier. Mais pour l’instant, l’enquête préliminaire gérée par le Parquet de Paris – qui possède un pôle de santé publique –  est entre les mains des gendarmes de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp).

Parallèlement à cela, faisant suite à la plainte déposée par six victimes représentées par maîtres Charles Joseph-Oudin et Charles Honnorat devant la 15ème chambre correctionnelle du tribunal de Nanterre (Hauts de Seine, siège des laboratoires Servier), Jacques Servier ainsi que quatre cadres de son groupe sont appelés à comparaître le 11 février prochain. Selon le Monde, les victimes accusent le groupe Servier, sa filiale Biopharma qui commercialisait le Mediator et ces cinq personnes physiques de « tromperie aggravée ».

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