La  mission parlementaire sur le Mediator conduite par le député et cardiologue Gérard Bapt (PS-Haute Garonne) a commencé hier après-midi ses travaux, à l’Assemblée nationale. Appuyées par Jean-Pierre Door (UMP-Loiret, lui aussi cardiologue), le rapporteur de la mission, les premières auditions ont concerné le Dr Irène Frachon, médecin pneumologue brestoise, auteur d’un livre sur le médicament des laboratoires Servier, dont la publication cet été a médiatisé l’affaire. Par une curieuse concordance des temps, la cour d’appel de Rennes vient d’invalider la décision de retirer de la couverture du livre « Mediator », le sous-titre : combien de morts ?,  donnant ainsi tort aux laboratoires Servier qui avaient intenté une action en justice en ce sens.

Le Pr. Grégoire Le Gal, professeur de médecine interne au CHU de Brest, ainsi que Mme Flore Michelet, étudiante en pharmacie à l’université de Rennes 1, auteur d’une thèse sur le Mediator, ont également été entendus. La mission qui s’appuie sur le rapport de l’Igas remis le 15 janvier dernier,  compte poursuivre ses investigations en auditionnant les politiques – tous les ministres de la santé successifs depuis Hervé Gaymard, secrétaire d’Etat à la Santé entre 1995 et 1997, jusqu’à Xavier Bertrand. Elle a également l’intention d’auditionner les responsables des laboratoires Servier, si ces derniers l’acceptent (la mission n’a pas de pouvoir coercitif), ainsi que les responsables de la chaîne de pharmacovigilance ou de visite médicale depuis 1994. La conclusion de ces travaux est attendue avant l’été, et Gérard Bapt a déjà dessiné ses contours au-delà du strict dossier du Mediator  : « la pharmacovigilance et les processus de mise sur le marché » ainsi que « les affaires de conflit d’intérêt ».

Parallèlement aux travaux de l’Assemblée nationale, une mission sénatoriale sur le Mediator, l’évaluation et le contrôle des médicaments menée par François Autain (Parti de Gauche, Loire Atlantique, lui aussi ex médecin) s’est mise en place mardi dernier. Outre de nombreuses auditions, la mission envisage plusieurs déplacements afin d’étudier les systèmes de sécurité sanitaire en Europe et aux États Unis.  Les membres de la mission d’information se sont fixés l’objectif d’achever leurs travaux fin juin 2011.

Enfin, c’est Nicolas Sarkozy lui-même, qui a choisi fin décembre, de s’entourer de deux personnalités médicales à qui il a confié la mission d’enquêter sur le Mediator. Les Prs Bernard Debré, député UMP de Paris et professeur d’urologie à l’hôpital Cochin de Paris et Philippe Even, président de l’Institut Necker – ils écrivent ensemble un livre sur les scandales sanitaires de ces dernières années – ont été mandatés pour rédiger un rapport, qui doit être remis d’ici le mois de mars au Président de la République et à Xavier Bertrand.

En ligne de mire de ces deux sommités connues pour leur francparlé et leur appétence médiatique : le financement de l’Afssaps, actuellement assuré par une dotation de l’industrie pharmaceutique, la lutte contre les conflits d’intérêts (Nicolas Sarkozy, en s’appuyant sur le rapport Sauvé sur le sujet, a annoncé une loi avant la fin de l’année). Et enfin, le contrôle de la filière du médicament puis l’amélioration de la diffusion de l’information à destination des médecins et du grand public. Au début du scandale du Mediator, le Pr. Bernard Debré avait accusé en ces termes, tous les ministres de la Santé qui se sont succédé depuis la première alerte donnée en 1998 : « Ignorer pour un politique, c’est une faute. Un ministre doit être responsable de son administration ».  Une déclaration qui avait suscité une certaine émotion dans les rangs de la majorité.