Conférence de presse du Dr. Michel Combier, Président de l’UNOF
Note de presse du Mercredi 19 Janvier 2011


Quelles perspectives pour les médecins libéraux intervenant en EHPAD ?


Plus de 10 ans de combat
La loi de janvier 2002 institue le principe d’un contrat entre le professionnel libéral de santé et l’Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) dans lequel il intervient, mais sans pour autant définir le cadre général applicable à tous via un contrat-type. Cette loi a consacré une relation individuelle qui fragilisait le médecin par rapport aux établissements et pesait sur la rémunération.
Malgré le rapport défavorable imposé aux médecins, nombreux d’entre eux ont été contraints à signer des contrats imposés par les établissements dans lesquels ils interviennent. Un véritable maquis des contrats individuels s’est développé avec autant de formes de contrats comportant les obligations les plus variées selon les établissements et notamment la Permanence de soins (PDS) obligatoire. Il en est de même au niveau de la rémunération qui est assujettie au bon vouloir du directeur de
l’établissement, au forfait ou à l’acte, avec pour conséquence, dans bon nombre de cas, la requalification des honoraires en salaire par les URSSAF. Dès 2002, l’UNOFCSMF a réagi, et elle était bien seule pour faire obstacle à l’application de ce texte et
défendre le principe d’un contrat type unique négocié au niveau national.

Il a fallu plus de dix ans de combat avec les services de l’État et les établissements pour que les choses bougent enfin. Et cela n’a pas été simple car la technostructure n’a aucune idée de ce en quoi consiste l’exercice libéral de la médecine.


Une négociation au couteau pour une contractualisation encadrée nationalement

Durant les dix-huit derniers mois, les négociateurs, parmi lesquels un représentant de l’UNOF-CSMF, ont dû faire face aux volontés du Ministère et de la Direction de la Sécurité Sociale (DSS) de vouloir transformer les EHPAD en établissements de santé,
remettant alors totalement en cause la possibilité pour les médecins libéraux d’exercer en EHPAD. Cette orientation n’a finalement pas été retenue et un contrat type national a été élaboré.
L’objectif poursuivi par l’UNOF-CSMF était simple : obtenir la suppression du caractère individuel de ce contrat au profit d’un contrat collectif négocié nationalement et soumis à une signature individuelle.
Il s’agissait de protéger le médecin, de maintenir le libre choix, d’éviter le paiement au forfait ou à la capitation pour préserver le paiement à l’acte, de supprimer les obligations de permanence des soins, de garantir les avantages conventionnels comme la prise en charge partielle des cotisations sociales par les caisses, d’obtenir que soient rémunérées les différentes réunions qui ne l’étaient pas.
Après plusieurs moutures, des textes réglementaires sont parus. Certains syndicats, qui ne s’étaient jamais saisis de ce dossier, s’en sont émus avec des accents de démagogie inacceptables, révélant une vision à court terme. Le décret et l’arrêté publiés au Journal officiel du 31 décembre 2010 sont des textes de compromis, et donc imparfait mais dans lesquels les intérêts des médecins libéraux ont été améliorés par rapport au contrat individuel. De ce point de vue, c’est une première étape et il
faut aller plus loin.
Le contrat n’est plus individuel mais enfin négocié nationalement, ce qui permet aux syndicats médicaux de reprendre la main face aux directeurs des établissements, et surtout de négocier collectivement les améliorations indispensables. Ce point est un
élément essentiel de la défense individuelle des médecins libéraux. Ensuite, il préserve la continuité libérale de l’intervention du médecin traitant en EHPAD et sa liberté d’exercice.
Ce contrat est un contrat de coordination entre les professionnels de santé intervenant au sein de l’EHPAD et un contrat de qualité de soins. Il n’instaure aucun lien de subordination entre le médecin libéral et le directeur de l’EHPAD, pas plus
qu’avec le médecin coordonnateur, ce qui n’était pas le cas dans tous les contrats individuels.


Il intéresse les médecins traitants et ne s’applique pas aux médecins qui interviennent occasionnellement en EHPAD, notamment les spécialistes d’organes et les médecins
intervenant dans le cadre de l’urgence.
La plupart des contreparties qui ont été formalisées relèvent de l’exercice classique de la médecine libérale : préparer et actualiser un dossier médical sous forme papier ou
informatique, assurer la continuité des soins, s’enquérir des bonnes pratiques dans les domaines gériatriques et éviter de consulter dans l’établissement pendant les heures
de repas.
La contrainte nouvelle qui a été formalisée est celle pour le médecin intervenant en EHPAD de participer à une réunion annuelle obligatoire de la commission gériatrique
de coordination, qui constitue en quelque sorte une Conférence Médicale d’Etablissement (CME) au sein de l’établissement. Le médecin est pour cela rémunéré sur la base de 4 C alors que précédemment il était amené à participer à une multitude
de réunions sans aucune contrepartie.


Un contrat imparfait mais qui permet une reprise en mains nationale.

Ce contrat est naturellement loin d’être parfait. Il mérite d’être approfondi et précisé, notamment pour confirmer la liberté de choix du patient, ne pas autoriser le directeur de l’EHPAD à le dénoncer sans motif grave et conforter le principe du paiement à l’acte. Il reste enfin à négocier, dans le cadre conventionnel, une rémunération propre aux actes effectués en EHPAD car les interventions des praticiens sont plus complexes et chronophages. D’ailleurs, l’UNOF-CSMF demande dans son programme qu’à l’instar des majorations nourrissons et jeunes enfants soit instaurée une majoration personne âgée dépendante.

En conclusion,

Ce nouveau contrat-type pour les médecins intervenant en EHPAD constitue une première avancée, mais n’est certainement pas une fin en soi. Le combat a été très long pour parvenir à ce résultat. Il convient à présent de le poursuivre nationalement pour obtenir les modifications indispensables, en particulier sur le
mode et le niveau de la rémunération et sur l’équilibre du contrat face au pouvoir du directeur de l’établissement tel qu’il y est écrit pour préserver la liberté de choix du patient et la liberté d’intervention des médecins traitants dans ces établissements.