Lettre ouverte à Madame Roselyne Bachelot, Ministre de la santé et des sports

 

 

Madame la Ministre,

 

Vous avez bien voulu écrire à tous les médecins généralistes, le 9 juin dernier, pour confirmer les annonces du chef de l’État du 16 avril dernier, d’appliquer le C à 23 € au 1er janvier 2011, mesure conventionnelle pourtant signée le 27 mars 2007, et d’autoriser les médecins qualifiés spécialistes en médecine générale à coter CS à 23 € à la même date.

 

L’UNOF-CSMF, qui a lu ce courrier avec la plus grande attention, n’y a rien découvert qui puisse apporter un début de solution à la très grave crise des médecins généralistes.

 

En effet, si vous aviez jugé prioritaire cette revalorisation de la valeur de l’acte de base du médecin généraliste, pourquoi avez-vous tout fait, depuis 2007, pour empêcher et retarder son application ? Pourquoi la repousser encore jusqu’à la fin de l’année, si elle vous paraît aussi essentielle ? Pourquoi ne pas l’avoir appliqué immédiatement, ce qui aurait démontré l’intérêt que vous portez aux médecins généralistes par un acte tangible – et non par une promesse – que vous étiez déterminée à vous engager dans une démarche de reconstruction de la médecine générale ?

 

Dans votre courrier, Madame la Ministre, vous promettez un développement professionnel continu (DPC) dont les médecins seront acteurs. Pourtant, vous savez très bien que la profession n’aura pas son mot à dire car l’État et les Caisses qui seront majoritaires dans toutes les instances, tireront toutes les ficelles et prendront toutes les décisions pour faire du DPC un levier de la maîtrise comptable. Le seul espace de liberté que vous accordez aux médecins est de choisir le lieu de leur formation. C’est un peu court !

 

Par ailleurs, Madame la Ministre, nous aurions aimé que vous nous expliquiez que la technostructure de votre ministère, qui ignore tout de ce qu’est un médecin généraliste libéral, s’est trompée, et vous a sans doute conduite dans un corner en vous faisant porter une réforme qui tue la médecine générale de proximité.

 

Nous attendons tous que vous reveniez sur les mesures inadaptées et dévastatrices contenues dans votre loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires ». Cette loi contient les germes de la crise d’aujourd’hui qui sera, si vous ne réagissez pas, le désastre des prochains mois.

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Les déclarations d’absences obligatoires lorsqu’il n’y a rien à signaler de particulier, le contrat de solidarité obligatoire obligeant le médecin à abandonner sa patientèle pour aller dans des zones sous-médicalisées sous la menace d’une taxation punitive de 3000 € annuels, la taxation absurde des feuilles de soins, le délit statistique destiné à normer arbitrairement les pratiques à l’aveugle, la permanence des soins obligatoire et rémunérée de façon aléatoire selon le bon vouloir du directeur de l’Agence Régionale de Santé, le renforcement du système des pénalités qui bafoue les droits élémentaires de la défense, les descentes des IGAS dans les cabinets médicaux, … voilà un échantillon des brimades que vous nous avez réservées, et que vous semblez vouloir maintenir. Elisabeth Hubert elle-même s’inquiète déjà, au début de sa mission, de la désaffection de la médecine générale et prévoit que les difficultés démographiques, attendues dans dix ans, apparaitront plus tôt. Pourquoi ? Parce que toutes ces mesures dégoûtent les médecins installés, les plus productifs, de poursuivre leur métier car ils en ont assez d’être constamment sous la pression d’une technostructure culpabilisante et éloignée des vrais problèmes de santé du terrain.

 

A cela, s’ajoute le retour de la maîtrise comptable pure et dure. Avec votre collègue des Finances, vous nous avez annoncé que désormais, nos revalorisations futures seront conditionnées au strict respect, à l’euro près, des objectifs de dépenses de l’assurance maladie, dont vous ferez en sorte, bien sûr, qu’ils soient intenables.

 

Sur toutes ces questions essentielles, qui conditionnent directement notre quotidien, vous n’apportez aucune réponse, alors que vous détenez tous les leviers.

 

Dans ce contexte, Madame la Ministre, nous trouvons le contenu de votre courrier un peu « maigre ». Nous attendons d’autres réponses de votre part que des promesses et le report des solutions au résultat futur d’une énième commission.

 

En attendant, pour vous aider dans votre réflexion et, au-delà, à convaincre vos collègues du gouvernement, l’UNOF-CSMF poursuit et intensifie la mobilisation qu’elle a engagée le 12 avril, autour de l’application immédiate des accords de 2007 : le C à 23 € et la visite à 33 €.

 

S’il s’avère, comme vous l’exprimez, que notre métier et notre mission importe tant à vos yeux, nous comptons sur vous pour relayer notre colère face à un gouvernement qui reporte les mesures, punit, et ose promettre encore, après avoir engagé la démolition de la médecine générale. Ce qu’il nous faut, Madame la Ministre, ce sont des actes. En attendant, parce que nous refusons d’être traités comme des citoyens de seconde zone, nous avons décidé d’agir  parce que c’est à ce prix que nous pourrons nous faire respecter. Trop, c’est trop !

 

Madame la Ministre, nous sommes impatients de vous lire à nouveau, mais avec de vraies réponses.

 

Dr Michel COMBIER

Président de l’UNOF-CSMF

 

U.N.O.F
Le Syndicat des Spécialistes Libéraux en Médecine Générale

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