Fini de rire. Le Président de la République a abattu ses cartes à l’issue de la conférence sur les déficits publics : le nouvel Ondam (objectif national des dépenses d’assurance maladie) va devenir indépassable. Autre annonce : alors qu’il est fixé à 3 % pour l’année 2010, il descendra à 2,9 % l’an prochain et 2,8 % en 2012. Autant dire que l’époque des vaches maigres est revenue, et qu’elle se conjugue avec une maîtrise comptable qui ne cache même plus ses intentions.
Car, pour parvenir à cette maîtrise stricte des dépenses, le gouvernement va mettre en place un système renforcé d’alerte, directement inspiré des travaux de Raoul Briet, de la Haute autorité de Santé, chargé par le Président de la République, de plancher sur le sujet de mécanismes « réellement efficaces » pour faire respecter l’Ondam voté par le Parlement. En treize ans, depuis sa création, l´Ondam a accumulé un dérapage de 20 milliards d´euros, a souvent souligné le gouvernement.
Le nouveau mécanisme imaginé par Raout Briet, éminent  spécialiste de la protection sociale, préconise d´anticiper au mois d’avril la procédure d´alerte, qui se déclenche actuellement en juin dès que le dynamisme des dépenses dépasse de 0,75 % leur évolution autorisée. Ceci pour que les éventuelles mesures de redressement (baisse de tarifs, gel de crédits, etc.), soient efficaces dès le début de l’année suivante. Il suggère également, de réduire cette tolérance à 0,50 % et propose que le Comité d´alerte sur les dépenses d´assurance maladie puisse donner un avis dès l´automne, au moment de la rédaction de la loi, sur le réalisme de l´Ondam. Cet avis serait inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (Plfss) de l´année suivante.

Raoul Briet propose également de conditionner certaines dépenses nouvelles inscrites au Plfss, au respect de l´Ondam et enfin, de mettre en réserve, en début d´année, certaines dépenses destinées aux hôpitaux, et de ne les engager qu´au vu du taux d´évolution conforme des dépenses. Seraient ainsi concernées les enveloppes destinées aux missions d’intérêt général des établissements hospitaliers, les fameuses Migac, qui financent notamment les urgences, ou encore les fonds réservés  aux personnes handicapées hospitalisées. Mais certaines dépenses budgétées pourraient subir le même gel, comme les revalorisations d’honoraires ou les fonds attribués au Ficqs (fonds d’intervention pour la coordination et la qualité des soins). La menace plane donc clairement sur le C à 23 euros promis par un Chef de l’Etat en pleine opération de séduction vis-à-vis de la médecine de proximité.
Toutes ces décisions brutales ont immédiatement poussé la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf) à dénoncer le retour de la maîtrise comptable « dans le droit fil du plan Juppé ». Et à noter que ces mesures de rigueur interviennent par ailleurs, « au moment où une nouvelle convention doit être négociée. Elles signifient que les médecins n´auront pas de grain à moudre pour répondre à leur profond malaise et sauvegarder l´exercice libéral de la médecine ». Pour la centrale, ces dispositions « rendent illusoires toutes les mesures de revalorisations qui pourraient être signées en les assujettissant au strict respect des objectifs de dépenses. Pire, elles hypothèquent la promesse du C à 23 € au 1er janvier 2011 pour les généralistes, puisque le Président de la République a exigé le strict respect de l´Ondam pour 2010, alors que chacun sait déjà qu´il sera dépassé ».

La CSMF appelle donc les médecins libéraux « à ne pas se résoudre à la casse de la médecine de ville et à se mobiliser pour protester et appliquer massivement le C à 23 €, le C 2 à 46 € et à facturer toutes les gardes et les astreintes effectuées par les médecins en établissement ».