En 2002, Bernard Kouchner, ministre de la Santé, gastroentérologue, pond, en quittant le ministère, une loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Dans son article 75, cette loi crée une brèche au monopole médical, une excuse légale en quelque sorte : tout détenteur du titre peut exercer l’ostéopathie.
Ainsi, sont autorisés les ostéopathes non-médecins à exercer leur art thérapeutique sans cette capacité diagnostic qui nous est chère.
Bien embêté par cela, ce n’est que 5 années plus tard que Dominique de Villepin publie un peu contraint les décrets d’application en y ajoutant quelques restrictions d’exercice : les Ostéopathes non-médecins n’ont pas le droit de faire des touchers pelviens (heureusement, ils ne sont ni médecins ni gynécologues), ils peuvent manipuler le crâne d’un nourrisson, son rachis cervical ainsi que le rachis cervical de l’adulte mais ces actes nécessitent un certificat de non contre-indication établi par un médecin.
Ce décret ne semble pas ambigu, ce qui l’est, c’est son application : qui a déjà rédigé un certificat de non-contre-indication ?
Depuis lors, les Ostéopathes mettent sur leurs plaques DO, non pas Docteur en Ostéopathie, mais Diplômé d’Ostéopathe, belle nuance !
20 ans après, 70 % de la France est en désert médical, nos patients se tournent vers ces professionnels pensants s’adresser à des professionnels de santé.
Cerise sur le gâteau, ces soins ne sont pas remboursés, à croire que l’amélioration des comptes de la sécu était organisée : gouverner c’est prévoir…une amélioration des déficits sociaux : un acte remboursé par les mutuelles coûte plus cher en mutuelle qu’à l’Etat.
Peut-on faire le parallèle avec la psychiatrie en France : 71 000 psychologues pour 15 000 psychiatres, quel patient peut reconnaître à qui il s’adresse, qui est formé au diagnostic et la thérapeutique des maladies mentales, comment s’étonner alors que la psychiatrie aille mal ?
Alors, oui, la loi Rist (députée du Loiret, médecin rhumatologue) me fait plaisir :
C’est la fin des plaisirs solitaires !
Nous, Médecins Ostéopathes, ne sommes plus seuls à assister à la dégradation des soins par délégation à des professionnels qui n’ont pas cette compétence médicale forgée par 10 années d’études (je compte bien sur un éventuel redoublement au début ou au milieu de ce long cursus) : Sus à l’onanisme médical, cette masturbation intellectuelle qui nous procure ce grand plaisir de chercher le bon diagnostic, la bonne thérapeutique : loin du plaisir éphémère, celui-là dure !
Fini le diagnostic médical,
Vive le diagnostic infirmier, kinésithérapique, orthophonique, chiropratique, ostéopathique, naturopathique, étiopathique…
La justice est lente et inébranlable : elle est pourtant plus réactive qu’il n’y paraît : voyant qu’un médecin pouvait être expertisé en justice par un Ostéopathe non-médecin, elle a actualisé ses rubriques judiciaires pour séparer ces professions qui n’ont pas la même expertise :
• Rubrique F1 médecine manuelle et ostéopathie médicale pour les médecins,
• Rubrique F8 pour les auxiliaires médicaux (Kinésithérapeutes) sans notion d’ostéopathie,
• Rubrique F12 Non professionnels de santé, bien-être, Confort… pour les ostéopathes non-médecins.
Ainsi, chacun est à sa juste place.
Il nous semble tout à fait licite que nos patients veuillent accéder à des soins de confort (quoi de plus agréable que le confort), mais soigner nécessite un diagnostic médical, ce qui n’est pas forcément très confortable.
La qualité des soins est au prix de longues études, de formation complémentaire, de compagnonnage, tout ceci au service de nos concitoyens. Ne négligeons pas cela dans un mélange des genres préjudiciable à des soins de qualité.
Dr Antoine Guinoiseau, Président du SMMOF
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