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EGORA – Rémunération, critères d’éligibilité, parcours de soin : tout sur le nouveau dispositif médecin-psychologue en MSP

C’était un engagement du Ségur de la santé : dans un communiqué du 28 mai, le ministère a annoncé le lancement d’un “dispositif de renforcement en psychologues” dans les maisons et centres de santé. Après avoir été adressés par leur médecin traitant, les patients bénéficieront de séances de psychologie et/ou psychothérapie intégralement prises en charge.

 

Un nouveau binôme débarque en ville : médecins et psychologues vont bientôt travailler de concert pour prendre en charge des patients en souffrance au sein des maisons et centres de santé. Conformément au Ségur de la santé (mesure 31*) et “dans le prolongement des expérimentations du remboursement des thérapies non médicamenteuses conduites par la Cnam dans quatre départements depuis 2018”, le ministère de la Santé a annoncé vendredi 28 mai le lancement d’un “dispositif de renforcement en psychologues” dans les structures d’exercice coordonné. Dans le contexte de crise sanitaire et de dégradation de la santé mentale des Français, il s’agit “d’offrir une première réponse à des états de souffrance psychique repérés par le médecin traitant, tout en identifiant des indicateurs de gravité justifiant, le cas échéant, une orientation vers les soins spécialisés”, souligne le ministère dans son communiqué.

 

 

Concrètement, le ministère financera, par le biais des fonds d’intervention régionale (FIR) des ARS, 200 équivalents de temps plein de psychologues, pour un montant annuel de 12 millions d’euros pendant trois ans, reconductible. En tant que “salariés ou prestataires”, ces psychologues seront amenés à prendre en charge les patients mineurs (âgés de plus de 3 ans) ou adultes “en souffrance psychique pour des troubles légers à modérés” qui leur auront été adressés par leur médecin traitant. “Il n’est pas fait mention de prescription médicale mais bien de l’adressage d’un patient par son médecin qui en a évalué le besoin, à un psychologue”, insiste sur concourspluripro.fr Pascal Chauvet, trésorier de la fédération AVECsanté** et membre du groupe de travail sur ce dispositif.

 

Et le psychiatre alors ?

En fonction des besoins des patients, seront proposés un bilan initial et 10 séances “au maximum” de prise en charge psychologique, puis “si nécessaire” – mais seulement pour les adultes – 10 séances “au maximum” de psychothérapie spécifique (thérapie comportementale et cognitive, psychothérapie psychodynamique ou d’inspiration analytique, psychothérapie interpersonnelle ou thérapie d’inspiration familiale). Et ce sans reste à charge ou avance de frais.

À l’issue des séances, “un nouveau bilan est réalisé et discuté avec le médecin généraliste, pouvant aboutir à l’absence de suite à donner ou une proposition d’une psychothérapie spécifique après avis du psychiatre”, précise le cahier des charges auquel Concours pluripro a eu accès. Le cas échéant, le psychiatre pourra également décider de l’orientation vers un centre médico-psychologique ou vers une autre structure. Libéral ou hospitalier, le psychiatre (ou pédopsychiatre) interviendra “dans les situations complexes d’emblée ou lors de la réévaluation d’un patient, notamment pour les troubles psychiques persistants ou non répondants à la prise en charge initiale”. Un point dénoncé par AVECsanté. “Nous ne cautionnons pas cette évaluation du psychiatre qui remet en cause les compétences professionnelles des médecins et des psychologues, titulaires d’une formation master 2 en psychologie clinicienne, pour être retenus dans le dispositif”, pointe Pascal Chauvet.

 

 

Des critères d’exclusion ont été déterminés : les patients âgés de moins de 3 ans, patients en ALD ou en invalidité pour un motif psychiatrique ou en arrêt de travail de plus de 6 mois pour un motif psychiatrique, patients ne pouvant pas communiquer avec le psychologue (barrière de la langue) ; patients présentant un trouble neurodéveloppemental sévère ; patients avec antécédents de suivi psychiatrique dans les trois ans ; toute situation d’urgence psychiatrique détectée par le médecin traitant ou situation où le patient nécessite un avis spécialisé par un psychiatre, personnes avec comorbidités psychiatriques,  patients bipolaires ou borderline sous anti-épileptiques, etc.

Les MSP et centres de santé participant au dispositif seront sélectionnés et financés par les ARS : jusqu’à 66 665 euros de dotation pour un psychologue à temps plein sur l’année. Les ARS “vont lancer un appel à candidature avec une priorisation sur les territoires défavorisés, donc ceux en désertification médicale et en précarité, indique Pascal Chauvet. Il fallait un critère pour la sélection, mais la souffrance psychologique n’est pas liée au territoire. Selon nous, la limite repose surtout sur l’ambition budgétaire du dispositif !” Concrètement, l’enveloppe annuelle de 12 millions d’euros ne permettra de financer le dispositif que dans “25 à 30% des MSP” du territoire national, déplore le trésorier d’AVECsanté.

 

Avantage au salariat

Quant aux psychologues, ils pourront être salariés ou libéraux. “Dans un premier temps, le ministère et l’Assurance maladie ne voulaient que du salariat, souligne Pascal Chauvet sur concourspluripro.fr. Mais nous leur avons expliqué que 60% des MSP comptent des interventions de psychologues libéraux. Nous sommes donc parvenus à disposer d’une tarification libérale. Néanmoins, le modèle économique privilégie le salariat au détriment de la prestation”, déplore-t-il. Le calcul est vite fait : un psychologue salarié se verra proposer 2600 euros net mensuels pour un temps plein, contre 22 euros par séance en libéral. “En comparant les deux modes de rémunération, on s’aperçoit que le salariat serait plus avantageux puisque cela permet aux psychologues de gagner environ 17 euros net la séance, alors qu’en libéral, cela revient à 11 euros une fois les charges déduites”, détaille Pascal Chauvet. “Les psychologues sont vent debout.”

Ce dispositif sera évalué et pourra évoluer au fil des années. Pour le ministère, il constitue “une nouvelle étape dans le chantier de plus long terme concernant un accès généralisé de la population à des soins psychologiques de qualité portés par des psychologues de ville dans le cadre d’un parcours de soins coordonné”. Pour Pascal Chauvet, qui espère sa généralisation à la France entière, c’est peut-être la clé vers la reconnaissance des psychologues en tant que professionnels de santé.

 

* “Renforcer l’offre de soutien psychiatrique et psychologique de la population”.
** AVECsanté : avenir des équipes coordonnées.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Aveline Marques avec concourspluripro.fr

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