“Médecin recherche associé”. Sur l’île d’Houat, dans le Morbihan, le Dr Richard Puydupin cherche un praticien prêt à s’associer à lui pour exercer, en alternance, par quinzaine. Pour Egora, il raconte son quotidien de généraliste au contact des insulaires, sa spécificité de propharmacien et ses journées, rythmées par les horaires de bateaux.

 

47° 23′ 21″ N, 2° 57′ 59″ O. Houat, petite île d’une superficie de 3km2, au sud de la Bretagne et au large du Golfe du Morbihan, 200 habitants à l’année. C’est ici qu’à débarqué, un peu par hasard il y a près de 30 ans, le Dr Richard Puydupin, après plusieurs remplacements “par-ci, par-là”.“J’y suis allé en 1991 en remplacement d’un copain qui avait créé le poste”, se souvient-il. Âgé de 60 ans aujourd’hui, le généraliste a exercé quasiment toute sa carrière sur l’île. “A l’époque, ils voulaient créer le poste en étant sûrs d’avoir un remplaçant régulier. C’était moi. Très vite, au bout de deux ans, nous avons demandé des subventions pour nous faire aider parce que nous avions des paies inférieures à celles des internes”, poursuit le médecin. Grâce au Département et à la Région, les deux praticiens ont alors pu s’associer et créer la base du fonctionnement qui prévaut encore aujourd’hui : une alternance de 15 jours chacun sur l’île, au cabinet, pendant que l’autre retourne sur le continent.

“Le secret de cette longévité réside dans l’alternance”, affirme-t-il. “Vivre sur une île de 200 habitants, sans vie culturelle en dehors de la pêche avec des enfants scolarisés, une femme travaillant sur le continent, ce n’est pas envisageable. Et emménager avec toute sa famille sur l’île, c’est prendre le risque de très vite tourner en rond !”, plaisante le Dr Puydupin. Non sans mal au fil des années, le généraliste est parvenu à fonctionner en binôme, tout en comptant sur un “gros pool de remplaçants”, lorsque ses associés sont partis. Depuis 2017, il était associé au Dr Patrick Wiéner, qui a pris sa retraite au mois de décembre. Pour maintenir l’équilibre existant, le praticien cherche donc son successeur.

 

 

Médecin et propharmacien 

“Au cabinet, le quotidien est rythmé par les horaires de bateau dont nous sommes dépendants, aussi bien pour la réception des médicaments frais ou non, que pour certaines évacuations non-urgentes, pour adresser et prendre des rendez-vous auprès des spécialistes”, détaille le Dr Puydupin. Pour les prises de sang par exemple, il s’arrange pour les regrouper de manière hebdomadaire, afin de piquer tout le monde avant le bateau du matin, le seul de la journée. Si la patientèle est la même qu’ailleurs, il confie toutefois que les accidents de pêche sont fréquents et que la population insulaire étant vieillissante, son activité s’oriente de plus en plus vers la gériatrie. Seule exception : l’été, où la charge de travail augmente car l’île se peuple de touristes et de résidents venant s’installer uniquement sur la période estivale.

Conscients de la chance d’avoir un médecin en permanence sur l’île, les houatais n’ont en revanche pas de pharmacie. “C’est une autre spécificité du poste, nous sommes propharmaciens”, explique le généraliste. Dès la première année en effet, l’exigence de pouvoir à la fois consulter, prescrire et délivrer les médicaments s’est imposée. “Une autorisation spéciale du Préfet de région nous a été accordée, c’est lui qui nous donne ce statut spécial. On se retrouve propulsés pharmaciens par la force des choses et nous avons dû apprendre ce métier sur le tas”. Dans le cabinet, une pièce spéciale “pharmacie” est donc présente. “La gestion est très chronophage, mais c’est pour un confort de travail médical sans pareil. Lorsque le patient sort de mon cabinet, on se dirige vers la pharmacie avec tout le stock. Au total, la consultation et la délivrance des médicaments prennent 40 minutes environ. Mais au moins, le patient a été vu et traité”.

 

 

Impossible, dans ces conditions, de se passer d’une secrétaire. “L’activité de propharmacie impose d’avoir un secrétariat car ça prend plus de temps que la médecine pure. Je ne suis pas de la génération informatique donc j’ai du mal à naviguer entre le logiciel médecine et le logiciel pharma de façon rapide et efficace. Ma secrétaire, elle, maîtrise la chose”, précise en riant le généraliste.

 

Une île peut en cacher une autre 

Une fois par semaine, le Dr Puydupin quitte Houat pour l’île d’Hoëdic, à une dizaine de kilomètres au sud-est. “Dois-je vous préciser qu’il est agréable d’aller consulter en bateau ?”, s’amuse-t-il. Le reste du temps, le médecin échange avec un infirmier, en poste là-bas en permanence.  Si la téléconsultation a fait un boom en 2020, les insulaires et patients du généraliste l’utilisent, eux, depuis plusieurs années. Au fur et à mesure, le médecin a noué un véritable contrat de confiance avec l’infirmier d’Hoëdic, qu’il décrit comme ayant la “bouteille d’un interne”. “Nous avons toujours fonctionné comme cela, sans fausse note. Mais nous n’avons pas la folie des grandeurs : dès qu’on ne sait pas, ça part à l’hôpital”.

L’hôpital… difficile en revanche de s’y rendre rapidement ! Le plus proche, celui de Vannes, nécessite de prendre le bateau vers le continent. “Pour une urgence, c’est l’hélico. Nous l’avons facilement, au mieux c’est 20 minutes. Le vent ne l’empêche pas de venir”. Les patients ayant besoin d’être hospitalisés les jours de mauvaise visibilité, sont évacués par les bateaux des Sauveteurs en mer (SNSM) de Quiberon. “Mais il faut pouvoir attendre un peu”, précise le Dr Puydupin. Pour cela, il a équipé son cabinet à Houat. “Je ne suis pas un hôpital mais je me suis muni de quelques outils qui rendent les choses plus faciles, comme un échographe ou un électrocardiographe portable par exemple”. Les pompiers, présents sur l’île et formés par le médecin et son ancien associé, disposent, eux, d’oxygène.

 

 

“Recherche associé”

A nouveau seul sur l’île, le Dr Puydupin pense pouvoir tourner avec des remplaçants jusqu’à la fin du premier trimestre. Il peut aussi compter sur le soutien de la CPTS “Presqu’île en mer”, qui regroupe les acteurs de la santé des îles et de la presqu’île, les professionnels de santé, services sociaux, structures hospitalières notamment et qui coordonne le soin sur les îles. “Il y a une planification qui est prévue si je ne trouve personne ou si je suis malade”, explique-t-il. La CPTS s’est en effet organisée pour faire de la télémédecine avec un objet connecté entre Houat, Hoëdic et Belle-Île-en-Mer si le médecin ne peut assurer ses consultations. Mais ce dernier rappelle : il cherche un associé afin d’éviter cette situation.

“La difficulté de ce type de poste vient souvent des conjoints”, confie-t-il, conscient que sa recherche n’est pas aisée. “Mais, le poste peut être intéressant pour un médecin en fin de carrière, par exemple, dont la famille est élevée”, précise-t-il en ajoutant : “Ce qui est bien, c’est que nous ouvrons les consultations uniquement sur rendez-vous. De 10h à 12h et de 17h à 19h, sauf le mercredi car le cabinet est fermé le matin ainsi que le vendredi après-midi. En revanche, c’est ouvert le samedi matin, toujours sur rendez-vous”.

Sur place, pas de difficulté de logement car le Dr Puydupin et son ancien associé partageaient une habitation, par alternance là encore, dans laquelle ils avaient chacun leur chambre. Une voiture est également mise à leur disposition par la mairie.

 

 

Quant au salaire, c’est 50/50. “On marche en régime communiste”, s’amuse le Dr Puydupin. “Blague à part, tous les honoraires sont mis dans un pot commun pour se verser une somme équivalente, étant donné que nous faisons au jour près, le même nombre d’heures de présence sur l’île. Cela évite les histoires de concurrence”, affirme le médecin.

 

Pour contacter le Dr Puydupin :

Les médecins intéressés peuvent joindre le médecin par mail à l’adresse : puydupin.richard@orange.fr.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Marion Jort

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