Pour sauver l’hôpital public et sortir de la crise, Édouard Philippe a proposé une série de mesures “d’urgences” et débloqué 1,5 milliard d’euros au total. Très attendues, ces mesures satisfont la Fédération hospitalière de France (FHF), mais déçoivent les collectifs Inter-Hôpitaux et Inter-Urgences.
“On avait besoin d’oxygène, là on en a eu.” Pour Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), les réponses qui ont été données sont “concrètes”. “Les gestes qui sont faits pour les primes, pour la prise en compte des personnels franciliens qui sont dans une région où le coût de la vie n’est pas le même que dans les autres régions, ce sont bien des réponses qui sont très concrètes”, a-t-il déclaré à la sortie de la conférence de presse donnée par Edouard Philippe et Agnès Buzyn, mercredi 20 novembre.
“Les primes répondent à des attentes précises : le bas salaire des aides-soignantes et des infirmières, la difficulté à les accompagner dans leur carrière, mais aussi la faiblesse de la rémunération des jeunes médecins qui débutent leur carrière, poursuit-il. On avait des trous dans la raquette en termes d’accompagnement de rémunération, là il y a moyen de répondre à ces questions. Au-delà des primes, ce qui a été annoncé, c’est la possibilité de redonner confiance aux acteurs à partir du moment où l’Etat s’engage. C’est la première fois que ça arrive sur trois ans. C’est un sacré changement alors que le système hospitalier chaque année, on resserre un peu plus la vis. (…) ça va aussi permettre de redonner une dynamique aux établissements. Je pense qu’il y a matière à redonner confiance aux hospitaliers.”
Interrogé sur Europe 1, le Dr Thomas Mesnier, député LREM à la tête de la mission urgences parle, lui, d’une “très bonne première étape pour redonner du souffle”. Selon lui, les établissements sont confrontés à “une maladie chronique grave” et les annonces du Premier ministre Édouard Philippe constituent “un investissement sans précédent”, qui “n’a jamais été fait jusqu’à présent”.
Son confrère, le Dr Olivier Véran, également député LREM, a quant à lui estimé que “derrière les milliards annoncés pour l’hôpital, il y a des lits qui vont pouvoir rouvrir, des soignants qui vont être recrutés, des carrières revalorisées, et de nombreux investissements réalisés au quotidien pour le confort des médecins, des soignants, et des patients” et soutient les mesures présentées par Agnès Buzyn et Edouard Philippe.
Derrière les milliards annoncés pour l’#hôpital, il y a des lits qui vont pouvoir rouvrir, des soignants qui vont être recrutés, des carrières revalorisées, et de nombreux investissements réalisés au quotidien pour le confort des médecins, des soignants, et des patients. pic.twitter.com/o8K4u7PTid
— Olivier Véran (@olivierveran) November 20, 2019
La Conférence nationale des doyens de médecine approuve, elle aussi, les mesures du plan d’urgence pour l’hôpital public. “La Conférence nationale des doyens et la communauté hospitalo-universitaire qu’elle représente, agira à la mesure de la confiance que lui a témoignée Agnès Buzyn, ministre de la santé, pour renforcer, dans les établissements de santé, les missions universitaires. La Conférence nationales des doyens de médecine salue l’augmentation des financements des missions universitaires du CHU par une revalorisation des MERRI (Missions d’Enseignement, de Recherche, de Référence et d’Innovation) annoncée par le Premier Ministre et la Ministre de la santé. La Conférence nationale des doyens réitère sa volonté que le pilotage de ces missions universitaires du CHU soit confié aux Doyens et aux Présidents de CME.”
Le directeur général de l’AP-HP, Martin Hirsch salue de son côté un plan qui aura des impacts “très positifs” pour les hôpitaux parisiens en notant que la reconnaissance spécifique du coût de la vie en Ile-de-France par le Gouvernement est une première.
Les modérés…
La présidente de la conférence des directeurs généraux de centres hospitalo-univeritaires, Catherine Geindre et le président de la conférence des présidents de commission médicale d’établissements de centres hospitalo-universitaires, le Pr François-René Pruvot, ont tenu a souligner la “réponse forte apportée à l’hôpital public”, mais disent toutefois rester “vigilants sur l’impact des mesures d’attractivité”.
“Le coup d’accélérateur mis mercredi en faveur de l’hôpital public constitue une réelle prise en considération de la nécessité d’apporter également des réponses concrètes à des professionnels dont le malaise est de plus en plus profond et justifié”, écrivent-ils. “Les actions au titre de la dette feront l’objet d’une attention particulière afin de s’assurer du respect de règles d’équité et d’équilibre dans la distribution des crédits. Les conférences seront également vigilantes à ce que les éventuels crédits économisés dans le cadre du chantier sur la pertinence permettent effectivement d’abonder les comptes des hôpitaux publics.”
Les déçus…
Pour les collectifs Inter-Urgences, Inter-Hôpitaux, Inter-Blocs, les associations(1) et les huit organisations syndicales représentatives paramédicales(2), la déception est grande. “Le Premier ministre ne répond pas à la gravité de la situation”, écrivent-ils conjointement dans un communiqué. Ils considèrent que ces annonces sont “très loin de répondre aux attentes des personnels”.
Sur BFMTV, le porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France, le Dr Christophe Prudhomme, a constaté un “certain nombre de mesures intéressantes mais qui sont très insuffisantes”.
Pour le porte-parole de l’association des médecins urgentistes, les mesures du plan d’urgence pour l’hôpital sont “insuffisantes” pic.twitter.com/Hvp1ULqRNG
— BFMTV (@BFMTV) November 20, 2019
France Assos Santé déplore un angle “strictement financier” des annonces. “Au regard d’un budget de 84 milliards d’euros par an, les 500 millions supplémentaires ne couvriront même pas les besoins de modernisation des infrastructures. Ils ne permettront pas non plus de résoudre la question cruciale du manque d’effectifs, pourtant garante de la qualité et de la sécurité des soins”.
Les collectifs, associations et syndicats demandent toujours un renforcement des moyens financiers, une revalorisation de l’Ondam d’au moins 4% (contre 2,45% prévu par le Gouvernement), le recrutement de plus de personnels, une hausse de salaires et enfin, l’arrêt des fermetures d’établissements et des services ainsi que la réouverture des lits à hauteur des besoins de la population. Une nouvelle manifestation est prévue le 30 novembre à l’appel du collectif Inter-Hôpitaux.
(1) Printemps de la Psychiatrie, Coordination Nationale des Comités de Défense des Maternités et des Hôpitaux de Proximité
(2) Amuf, APH, CFE-CGC, CFTC, CFDT, CGT, SUD, Unsa.
Source :
www.egora.fr
Auteur : Marion Jort
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