Entre la Grande conférence de santé de Manuel Valls boudée par la profession et la guérilla tarifaire lancée dès janvier par les médecins, l’année 2016 commencera sur les chapeaux de roues. Elle sera aussi, et surtout, marquée par les négociations de la nouvelle convention médicale… Egora a dressé la liste de tout ce qui vous attend pour cette nouvelle année. A vos agendas.

 

Protection universelle maladie

Attention, au 1er janvier, voilà l’entrée en jeu de la PUMA. Entendez par là, la protection universelle maladie, votée fin octobre dernier, dans le cadre du budget de la sécurité sociale 2016. Si l’on en croit les propos de la ministre de la Santé, il sera plus facile de changer de régime d’assurance maladie (ce qui n’est pas du luxe), en cas de perte ou de changement de travail, de mutations ou de changements de régimes (MSA, RSI ou sécu étudiante). La résidence régulière en France devient le seul critère demandé, et tous les changements, y compris de domicile et de caisse, pourront se faire à partir du site ameli.fr, sans délai et en quelques clics, garantit-on.

Autre changement : la disparition du statut d’ayant droit pour les personnes majeures, et l’attribution d’une carte personnelle à chaque assuré de plus de 18 ans, qui recevra ses remboursements sur son compte bancaire. Enfin, sur demande en ligne, une carte vitale personnelle pourra être attribuée à toute personne dès l’âge de 12 ans.

Selon le ministère de la Santé, en allégeant les contrôles, la réforme permettra de réaliser 20 millions d’euros d’économies dès 2016 et 100 millions à terme.

 

Protection complémentaire pour tous

En outre, au 1er janvier toujours, entre en vigueur la protection complémentaire obligatoire pour tous les salariés, en vertu de la loi ANI (accord national interprofessionnel). Ces derniers bénéficieront d’un contrat responsable, c’est-à-dire, à la fiscalité allégé pour l’employeur. Contre-partie pour le patient : respecter le parcours de soins et accepter certaines limitations du remboursement, des dépassements d’honoraires notamment.

Se pose dès lors la question, non résolue, de la prise en charge des dépassements d’honoraires en secteur 2. La question est également d’actualité pour les titulaires d’un contrat d’accès aux soins (CAS), car contrairement aux promesses faites lors de la mise en place du mécanisme, en 2012, ni les mutuelles, ni les assurances privées ou instituts de prévoyance ne se sont engagés officiellement à solvabiliser prioritairement ces dépassements contractuellement limités.

 

Tiers payant : le rapport qui dévoile le mécanisme choisi

En janvier également, on attend la remise du rapport circonstancié annoncé, décrivant les détails des mécanismes mis en place pour réaliser le tiers payant généralisé. Co-rédigé par l’assurance maladie et les organismes de complémentaire santé, ce rapport sera étudié à la loupe par les syndicats médicaux, qui redoutent de voir ressurgir le double flux, obligeant à une double saisie des médecins. Un scénario défendu par les mutuelles, qu’ils refusent mordicus.

 

Election des bureaux des URPS

Les mandats des élus aux unions régionales des professions de santé (URPS) ont été prorogés jusqu’au 1er janvier 2016, pour tenir compte de la mise en place au premier jour de l’année, de la réforme territoriale.

Les nouvelles URPS vont donc devoir procéder à l’élection de leurs bureaux respectifs, par collèges (médecine générale, praticiens à plateaux technique, autres spécialités). Des alliances sont à attendre parmi les représentants de la médecine générale, qui se sont notamment engagés à défendre une plateforme commune de revendications, pour la négociation conventionnelle qui débutera en février prochain, avec la CNAM. Ces nouvelles équipes se frotteront aux nouvelles ARS, qui ont été dotées de pouvoirs élargis par la loi de santé adoptée le 17 décembre dernier.

 

C à 25 euros, et plus

Mais cette rentrée ne sera pas une balade en gondole. Ce sera tout l’inverse même, une tempête et le début d’une offensive tarifaire des médecins généralistes qui pourrait bien durer plusieurs mois, afin de peser sur la convention médicale qui sera mise en chantier en février prochain. Mais le terrain de jeu a été délimité par le budget de la Sécu : contraint dans un ONDAM (objectif national d’évolution des dépenses d’assurance maladies) à 1,75 %, qui oblige à oublier les rêves tarifaires, alors que le prix du C est bloqué à 23 euros depuis le 1er janvier 2011. Invivable pour les leaders des syndicats de médecins généralistes, qui rappellent qu’en fonction des mécanismes conventionnels, toute augmentation validée par la tutelle, doit être différée de 8 mois avant de pouvoir s’appliquer. Ce qui nous amène à 2017, année électorale. Inenvisageable.

Dès la mi-décembre, l’UNOF-CSMF, le SML et MG France mettaient en circulation un questionnaire à destination des médecins généralistes, pour mesurer leur degré de mobilisation et le type d’actions auxquelles ils seraient prêts à s’associer : guérilla tarifaire sur le C et le V, à quel niveau ? Grèves de la PDSa, de la télétransmission, fermeture des cabinets, manifestations et l’on en passe… Dépouillés fin décembre, les réponses à ce questionnaire constitueront le guide de l’action syndicale pour la médecine générale, dès le mois de janvier. MG France qui a déjà lancé son offensive tarifaire dès mars dernier, estime que le C à 25 euros est un point de départ et que l’on ne peut démarrer la nouvelle année sans faire moins.

 

La grande consultation du conseil de l’ordre des médecins

Autre grande consultation, celle du Conseil national de l’Ordre des médecins, lancée par le CNOM en pleine crise contre la loi de santé, auprès de tous les confrères inscrits. Après une série de déplacements du bureau du CNOM à travers la France, des spots télévisés sur le métier de médecin et des sondages auprès des patients, les résultats de ce questionnaire diffusé à tous les médecins, seront dévoilés le 26 janvier à Paris.

Patrick Bouet, le président du CNOM, informe que ces résultats constitueront la plateforme de revendications de tous les médecins de France. Celle que le CNOM défendra auprès de tous les politiques, à un an et demi de la présidentielle. Car le président de l’Ordre est persuadé que la loi de Santé ne sera pas appliquée. Et que le prochain gouvernement sera obligé d’en élaborer une autre, à partir de de la synthèse ordinale, construite auprès de tous les médecins de France.

 

La grande conférence de santé de Manuel Valls et son boycott

Réunion, le 11 février, de la Grande conférence nationale de santé organisée par le Premier ministre. Manuel Valls en a eu l’idée lorsqu’il a reçu les délégations syndicales, qui avaient organisé une manifestation monstre à Paris, le 15 mars dernier, contre la loi de Santé. Mais le chef du gouvernement risque de se retrouver bien seul, avec les jeunes et les hospitaliers, tous les syndicats de médecins libéraux ayant décidé de boycotter l’événement, en protestation contre son intransigeance vis-à-vis du tiers payant généralisé en 2017 et d’autres points de la loi.

Ce même 11 janvier, les rebelles CSMF, FMF, MG France, le SML et l’Ufml organiseront leurs propres “Assises de la médecine libérale” à Paris, pour faire la pige au Premier ministre.

 

Démarrage des négociations de la convention médicale

Pour les médecins généralistes, qui entendent parler d’une même voix, le bilan de la convention 2011 est désastreux pour la spécialité. C bloqué depuis le 1er janvier 2011, nomenclature des spécialistes en panne, charges administratives liées au dispositif du médecin traitant qui s’alourdissent sans compensation, PDSa qui s’impose dans des agendas surchargés du fait de la désertification médicale, manque de moyens, manque de relève…. Le cahier de doléances est chargé, malgré les promesses de la ministre d’un lendemain qui chante, grâce à sa stratégie nationale de santé, qui entre dans sa phase 2, et le mythique “tournant ambulatoire”, qui doit se prendre sans moyens supplémentaires.

Car avec un ONDAM gelé à 1,75 %, le directeur général de la CNAM (qui négocie également avec les kinés, les dentistes et les infirmiers), a d’ores et déjà prévenu qu’il ne pourrait servir tout le monde. Et il a bien fait comprendre aux médecins qu’il n’était pas chaud pour la mise en place d’un C modulable, autrement dit, la CCAM clinique, pourtant inscrite en toutes lettres dans la catégorie “à faire”, de la convention 2011…

 

Tiers payant pour 10 millions d’assurés de plus

C’est le crash test redouté tant par la CNAM que par les médecins libéraux : la mise en place du tiers payant généralisé aux malades en ALD et aux femmes enceintes est prévue au 1er juillet 2015. Soit 10 millions d’assurés de plus qu’aujourd’hui, tous gros consommateurs de soins. Déjà, la mise en place du TPG pour les titulaires de l’ACS (aide la complémentaire santé), en juillet dernier, a été saluée par une promesse de boycott de tous les médecins libéraux.

Pour la CNAM, il s’agit d’un lancement à hauts risques, tant les médecins libéraux attendent l’assurance maladie au tournant. Elle a l’obligation de traduire dans les faits l’engagements du Président de la République, qui donné sa parole que le TPG ne serait lancé qu’à la condition qu’il soit rapide, facile et garanti pour ses utilisateurs. Presque la quadrature du cercle, tant les divers impératifs des divers protagonistes sont divergents.

 

Primaires de la droite

Les médecins libéraux, qui ont vraiment eu le sentiment d’être maltraités par la Gauche, vont suivre avec attention la désignation du leader de l’opposition. A Droite, tous ont promis d’abroger la loi de Santé avec plus ou moins de force. Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, en totalité. François Fillion, en partie. A suivre donc.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : C. L B