C’est une première en Europe : un hôpital transfrontalier s’apprête à ouvrir ses portes dans une vallée au beau milieu du massif pyrénéen. Dès la semaine prochaine, les patients français et espagnols seront pris en charge par des équipes mixtes et bilingues. Une innovation qui profitera aux habitants de cette zone de haute montagne mais aussi aux milliers de touristes qui affluent en hiver.

 

Perché à 1 000 mètres d’altitude, au cœur des Pyrénées, c’est un hôpital un peu particulier qui ouvrira ses portes la semaine prochaine. Il s’agit du premier hôpital transfrontalier d’Europe. Situé sur le versant espagnol, mais à moins de deux kilomètres de la frontière française, l’établissement prendra en charge les patients des deux pays.

“Puigcerdá est une zone de haute montagne, où les distances par la route vers les hôpitaux les plus proches, Perpignan, Barcelone, Toulouse sont à plus de deux heures”, explique Cristina Ferrer de la Fondation Hôpital de Puigcerdá. Un coin de montagne, qui ne compte que 32 000 habitants pour 53 communes des deux côtés de la frontière, mais aussi une zone très touristique en hiver.

 

Idée née dans les années 90

Avec 13 stations de ski dans la vallée, la population peut être multipliée par quatre en cette saison. Un nouvel établissement plutôt attendu, donc, dans cette région isolée où les routes sinueuses et parfois enneigées rendent tout déplacement difficile.

L’idée d’un hôpital transfrontalier est née dans les années 1990. Mais de la théorie à la pratique, il y a un monde. L’ouverture avait été initialement prévue pour 2007 puis repoussée pour 2012, et à nouveau annoncée en février 2014. Même si le projet est grandement soutenu au niveau européen, des accords compliqués entre la France et l’Espagne ont été nécessaires pour régler certains problèmes pratiques notamment. Quid du remboursement des soins par exemple ? Aujourd’hui, les responsables de l’établissement ont une réponse bien tranchée : “C’est un hôpital français. Le circuit d’admission du patient est donc le même que pour n’importe quel autre hôpital français, même si on est physiquement sur le sol espagnol.” Oubliée, donc, la carte de sécurité sociale européenne. “Ce n’est pas nécessaire !”. Chacun utilisera sa carte de sécurité sociale : carte Vitale pour les uns, carte sanitaire catalane pour les autres. Idem pour la mutuelle.

Un projet innovant qui aura mis plus de dix ans à voir le jour et aura coûté quelques 31 millions d’euros. Dès son lancement, il a été géré par les autorités sanitaires de France et de Catalogne. Aujourd’hui, la directrice de l’ARS Languedoc-Roussillon est la présidente du Groupement européen de coopération territoriale-Hôpital de Cerdagne (GECT-HC). Le ministre de la santé de la Généralité de Catalogne en est le vice-président. L’Union européenne a pris en charge plus de la moitié du coût des travaux, les administrations catalanes et françaises se sont réparties le reste et assureront les frais de fonctionnement.

 

Rassembler le meilleur des deux cultures sanitaires

Dans les faits, les patients auront accès à des consultations externes dans une vingtaine de spécialités. Trois autres pôles s’articuleront autour de la chirurgie, des urgences et d’un service de maternité. Au total, 64 lits et dix places en hôpital de jour.”Dix millions d’euros ont été investis dans des équipements qui sont d’une rare qualité. Un centre d’imagerie médicale avec IRM, quatre salles opératoires, un service d’urgence de 18 box… C’est un très bel établissement”, s’est réjouie Martine Aoustin, directrice de l’ARS Languedoc-Roussillon.

Si l’envoi d’un patient vers un autre hôpital s’avère nécessaire, alors les transferts se feront vers la France ou l’Espagne, selon la nationalité du patient.

“La plupart des médecins et du personnel viendra de l’ancien hôpital de Puigcerdá”, une structure plus modeste qui se transformera en Ehpad dès l’ouverture du nouvel établissement. “Mais nous sommes encore en train de recruter des médecins français”, assure Cristina Ferrer.”Toutes les équipes seront mixtes. La vocation de l’hôpital est de rassembler le meilleur des deux cultures sanitaires, des pratiques cliniques et des professionnels au bénéfice de la population locale”, tient-on à préciser à l’Hôpital de Cerdagne.

 

Professionnels bilingues

Bien entendu, la majorité des professionnels de l’hôpital sont au moins bilingues, en français et en castillan ou catalan. “Un programme de formation continue permettra un accompagnement dans l’apprentissage ou le renforcement de leurs connaissances des langues officielles de l’hôpital”, assure la responsable.

Si les différences entre les deux pays ont pu ralentir la naissance de cette structure transfrontalière, il semble que le temps a permis de réfléchir aux moindres détails. Que les Français se rassurent donc : “les repas suivront un horaire européen : déjeuner à 12h30 et dîner à 19h30”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier