La situation du régime complémentaire (44 % de la retraite) géré en autonomie par la CARMF fait la Une. Approuvée par le conseil d’administration, une réforme basée sur la mise en place d’une retraite à la carte suscite une levée de boucliers où CSMF et MG France dénoncent une mauvaise gestion des réserves par le Pdt Maudrux. Et un “marché de dupe” pénalisant actifs et retraités.

 

Une nouvelle fois, c’est la logique des blocs qui s’affronte à la CARMF. Après la réforme de l’ASV, qui représente 36 % de la retraite du médecin, après la mise sous tutelle par l’Etat de la Caisse nationale vieillesse des professions libérales, “maison mère” de la CARMF, c’est la survie de la retraite complémentaire qui partage la profession.

D’un côté : le Dr. Gérard Maudrux président de la Caisse autonome de retraite de médecins de France (CARMF), et son conseil d’administration majoritairement voué à sa cause, soutenu en l’occurrence par la Fédération des médecins de France (FMF). De l’autre, la CSMF et sa branche généraliste l’UNOF, MG France et le Syndicat national des médecins concernés par la retraite (SN-MCR). Terrain d’affrontement : la réforme du régime complémentaire qui vient d’être approuvée par le conseil de la CARMF à la majorité moins deux voix, malgré la campagne pour le non menée par les retraités et les deux centrales syndicales.

 

Retraite à la carte

La balle est désormais dans le camp de la tutelle, qui devra approuver ou repousser cette réforme applicable au 1er janvier prochain. Elle instaure le principe d’une retraite à la carte permettant de passer le cap du trou de trésorerie qui va se creuser dans le régime entre 2014 et 2031, sans quasiment toucher au niveau des cotisations et des retraites, affirme le président de la CARMF. Sans réforme, ajoute-t-il, il aurait fallu augmenter de 6 % le montant des cotisations pour assurer l’équilibre du régime. Comment compte-t-il s’y prendre ?

Aujourd’hui, les médecins doivent attendre 65 ans pour toucher leur retraite complémentaire sans pénalités (62 ans pour le régime de base, 65 ans également pour l’ASV). En cas de départ avant 65 ans, une pénalité de 5 % par année d’anticipation est appliquée, tant dans le régime complémentaire que pour l’ASV. La réforme Maudrux supprimerait cette notion de taux plein pour instaurer à la place une possibilité de départ dès 62 ans, avec une réduction de 15 % du montant de la retraite par rapport à 65 ans, pour l’augmenter ensuite de 5 % par année travaillée, soit + 15 % à 65 ans, + 25 % à 67 ans, et au-delà, + 3 % comme dans le régime de base. Parallèlement, la réforme gèle le montant de la pension des retraités actuels jusqu’en 2023 et désindexe l’augmentation de la valeur du point de l’inflation.

Tollé du côté des détracteurs de la mesure. “Quand on réduit le montant de la retraite de 15 % pour l’augmenter ensuite de 5 % par année travaillée, mais sur ce montant réduit, on ne récupère pas à 65 ans les 15 % perdus”, s’insurgent en cœur les retraités du SN-MCR, la CSMF et l’UNOF. Et l’UNOF de préciser que la réforme Maudrux “revient à repousser l’âge de la retraite de 65 à 66 ans pour obtenir une retraite complémentaire au taux actuel”.

 

“Marché de dupes”

MG France et encore plus virulent en attaquant de front la gestion des réserves (5 milliards d’euros) par la CARMF, gestion déjà pointée du doigt en juin 2013 par l’IGAS. Et le syndicat matraque le pilotage personnel du Dr. Maudrux, qui a “pénalisé” les médecins et tente maintenant de maquiller cette mauvaise gestion en imaginant l’artifice d’une retraite à la carte… “A son arrivée à la tête de la CARMF, Gérard Maudrux a stoppé la réforme du régime complémentaire initiée en 1996”, dénonce le syndicat dans un communiqué. “Elle aurait pourtant permis d’éviter les difficultés de ce régime qui est passé dans le rouge en 2014 et dont les réserves seront épuisées en 2031. A l’époque, la voie qu’il avait choisie était démagogique, avec un blocage beaucoup trop long du niveau des cotisations” ajoute-t-il. Sans réformes, le retour à l’équilibre n’est prévu que pour 2041.

La CSMF, qui dénonce un “marché de dupes” pénalisant actifs et retraités, demande que la CARMF engage “une vraie concertation avec l’ensemble des acteurs, en particulier les syndicats médicaux qui ont leur mot à dire”. Refus du président de la CARMF. Il ne nie pas le problème traversé par le régime complémentaire, explique que les réserves ont été constituées à cette fin, mais ne veut discuter qu’avec les membres élus de son conseil d’administration où les représentants des syndicats sont plutôt mal représentés. Déjà soumise au vote en juin 2013, la réforme avait recueilli 5 voix contre sur 22. Représentée le 25 avril dernier, pour tenir compte d’un alignement sur le régime de base concernant les bonifications, elle n’a plus recueillie que deux voix contre…

Au nom de la FMF, Jean-Paul Hamon approuve la ligne suivie par le Dr. Maudrux, et “soutient la juste réforme du régime complémentaire proposée par nos représentants démocratiquement élus à la CARMF”. Une réforme, selon la FMF, qui permettra “grâce à des ajustements minimes sur les cotisations et les allocations, d’obtenir l’équilibre sur le long terme avec les seules cotisations des médecins”.

 

La gestion du régime ASV brocardée

Au passage, la centrale brocarde la gestion du régime ASV par les syndicats médicaux, alors qu’après sa réforme, celui-ci “n’est toujours pas équilibré sur le long terme malgré leur décision de doublement des cotisations et de division par deux des prestations”. En outre, la survie du régime dépend du bon vouloir des caisses, qui acquittent les 2/3 des cotisations des médecins du premier secteur. Et si ces dernières ne veulent plus suivre (comme le recommande d’ailleurs la Cour des comptes), “la valeur de cette retraite se rapprocherait de celle des emprunts russes”… grince le syndicat.

La FMF annonce à l’occasion de sa convention d’octobre 2014, la publication d’un projet de refondation conventionnelle “dans lequel la retraite des médecins libéraux sera un élément capital”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne