La deuxième livraison du SCAN CMV Médiforce 2013 passe en revue les angoisses de 480 représentants de 10 professions de santé. Près de 6 sur 10 redoutent les transformations du marché de la santé lié à Internet, l’automédication, l’arrivée des soins low cost ou encore la concurrence de l’étranger.
A la question de savoir ce que redoutent le plus les médecins généralistes pour l’avenir, les professionnels consultés par CMV Mediforce ont fait montre d’un solide pessimisme. Ils ont situé en première position la décrue démographique (50%), la dévalorisation de la profession (42%) et le poids croissant de la réglementation (30%). Si c’était à refaire, ils ne sont que 44% à vouloir de nouveau exercer la médecine générale. Le constat est rude, certes, mais il n’est pas nouveau tant ces lourdeurs se sont incrustées après années après années dans le paysage médical. Elles étaient déjà mises en avant l’an passé, dans le premier SCAN réalisé pour l’observatoire des professions de santé libérale.
La nouveauté en 2012, c’est la monté de nouveaux périls qui font frémir les professions de santé, plus diffus car souvent hors des frontières et souvent plus virtuels. Il en va ainsi de la concurrence de la toile, de l’automédication, de la distribution low cost, du besoin de trésorerie pour investir dans un secteur qui s’internationalise… Les médecins généralistes sont encore peu touchés par ces périls virtuels, mais leurs collègues radiologues, pharmaciens, paramédicaux (kinés et infirmiers) biologistes ou vétérinaires sont déjà plongés dedans.
Deshumanisation
Prenez les radiologues par exemple. Ils sont 70% à se déclarer inquiets au sujet de leurs finances. La baisse régulière de la valeur des lettres-clefs et le montant colossal des investissements nécessaires à la profession, qui ne baissent pas, eux, expliquent cette inquiétude. Mais si leur perception du futur est incertaine, en ligne avec la moyenne des professions de santé consultées, ils ne redoutent pas une éventuelle concurrence, et majoritairement, ils referaient le même métier, qu’ils sont d’ailleurs les plus nombreux du panel (55 %) à recommander.
Les biologistes n’étaient pas présents l’an passé dans le premier SCAN de Mediforce. Pénalisés, comme les radiologues, par des coups de rabots constants sur de la valeur de leur lettre clef, fragilisés par l’arrivée inéluctable de capitaux internationaux dans le panorama, synonyme de perte d’indépendance et de financiarisation de la fonction, ils sont, avec les pharmaciens (et les vétérinaires) les moins optimistes sur leur situation : 45% seulement recommanderaient leur profession à un jeune. Les biologistes redoutent la disparition de la biologie de proximité, au même titre que la médecine de proximité, et la deshumanisation d’un métier au profit d’une industrialisation croissante.
Bon point néanmoins, les biologistes ne craignent pas la concurrence ni internet,et encore moins les services low cost. Ils seraient moins de la moitié (48%) à choisir de nouveau le même métier. Mais ils ne sont que 20% à le recommander…
Pessimisme
A qui internet fait-il le plus peur ? Indéniablement aux pharmaciens. Visés directement par la distribution parallèle de produits low-cost sur la toile, ils redoutent les effets de l’automédication sauvage sur la santé de leur officine, dont ils déclarent à 57%, que le chiffre d’affaire diminue. Les craintes des pharmaciens sont avant tout financières, avec une anticipation de la baisse de leur chiffre d’affaires. Ils redoutent aussi un contexte professionnel plus tendu, marqué par une concurrence tous azimuts accrue, avec l’ouverture des médicaments sans ordonnance aux grandes surfaces, la vente sur Internet et l’achat de médicaments à l’étranger, le développement de chaînes franchisées (40% le redoutent contre 16% en moyenne). Confirmée dans la réalité, la baisse du nombre d’officines reste aussi une source d’inquiétude relativement importante, relève Mediforce. Leur problématique rejoint celle des vétérinaires (voir plus loin).
Au résultat, si c’était à refaire, seuls 35% des pharmaciens redeviendraient potards, soit moins de la moyenne générale de 50%. Mais le pessimisme ambiant régresse puisqu’ils étaient 25% l’an passé. Effet de la réforme de la rémunération de l’officine ?
Voyages de santé
Les chirurgiens-dentistes se situent sur la même ligne. Il faut dire que la concurrence de la pratique low cost à l’étranger, ils la vivent déjà. Et ils accordent à leur profession une note en baisse par rapport à l’an dernier (5,3 contre 5,6), tandis que leur confiance vis-à-vis de l’avenir ne décolle pas de la note 4,5.
Les “chir-dents“ redoutent de voir leur situation financière se dégrader (48%, contre 35% pour la moyenne des professions de santé) du fait de l’augmentation des charges. Ils redoutent une réglementation plus contraignante et le désengagement toujours plus grand de l’assurance maladie, parallèlement à un renouvellement insuffisant de la profession. En matière de concurrence, les “voyages de santé” ou le low-cost les préoccupent fortement (35% le redoutent contre une moyenne de 9%).
Mediforce note que leur intention de refaire le même métier reste à la fois faible et constante (43 contre 45%), mais que seulement 38% le recommanderaient, un chiffre qui reste très proche de la moyenne.
Inoxydables
Les infirmiers semblent d’inoxydables optimistes, même si quelques angoissent poignent tout de même à l’horizon. Les inquiétudes tournent autour du développement d’une médecine à deux vitesses et une dévalorisation de leur métier. Ils vivent, certes, le développement de sites internet par des confrères comme un léger risque de concurrence, mais ils seraient 65% à vouloir refaire le même métier. En revanche, alors qu’ils étaient l’an passé, 65% à recommander cette fonction, ils ne sont plus que 40% à le formuler cette année…
Les kinés ? Tout comme les infirmiers, ils ont la pêche. D’une année sur l’autre, les kinésithérapeutes conservent le même point de vue sur la situation présente comme sur celle à venir même si Mediforce note une légère touche de pessimisme, liée à une baisse des remboursements ou à la non revalorisation tarifaire. Les kinés redoutent la concurrence des professions satellites comme les ostéopathes par exemple. Mais 75% referaient le même métier, le score le plus important du Scan CMV Médiforce, en hausse de 2 points par rapport à l’an dernier. Et ils seraient 55% à le recommander.
Grandes surfaces
Restent les vétérinaires pour fermer le ban de cet observatoire. Non concernés par les capacités de remboursement de l’assurance maladie, moins protégés donc, ces professionnels restent optimistes, mais redoutent l’impact de la crise sur leur clientèle et la concurrence d’internet ou des grandes surfaces. L’inquiétude de la profession porte surtout sur le contexte professionnel, notamment t l’achat de médicaments sur Internet ou les OTC, ces médicaments en vente libre en grandes surfaces (50% le redoutent contre16% en moyenne).
Pour les vétérinaires, Internet (38%), le développement des produits low-cost (55%), l’automédication (58 %) et l’achat de médicaments à l’étranger (42%) vont fausser la concurrence. Les vétérinaires ne sont plus que 38% à exprimer le souhait de refaire le même métier (contre 50% en moyenne) et 27% à le recommander (contre 35% en moyenne).
Source :
http ://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne