La Cour des comptes a publié ce jeudi son rapport annuel sur l’exercice 2010 de la sécurité sociale. Elle y plaide pour un renforcement des contrôles et une accélération de l’informatisation.

« Il n’y a jamais eu, en France, autant de médecins qu’aujourd’hui ni une densité médicale aussi forte ». Voici le constat que dresse la Cour des comptes.  En 2009, il y avait 209 000 médecins, dont 116 000 médecins libéraux (61 000 généralistes et 55 000 spécialistes). La densité globale de médecins est ainsi passée de 306 pour 100 000 habitants en 1990 à 335 en 2009.  

« Effets d’aubaine »

En revanche, de fortes disparités géographiques persistent en dépit des mesures incitatives existantes. « Les aides incitatives, la plupart cumulables, se sont multipliées sans cohérence entre elles », note le rapport qui préconise la mise en place de mesures « fortes et plus efficaces ». L’avenant 20 de la convention, par exemple, qui prévoit une majoration de 20% de la rémunération des médecins généralistes libéraux exerçant en groupe dans une zone déficitaire, apparaît comme trop « coûteux » – 20 millions d’euros par an, soit en moyenne 27 000 euros pour les médecins qui en bénéficient, la prime maximale ayant dépassé les 100 000 euros – pour un résultat « faible » .

Sécurité sociale : un déficit record

La Cour des Comptes pointe également dans son rapport le déficit de la Sécurité sociale qui a atteint en 2010 un niveau historique : 29,8 milliards d’euros, un montant qui a plus que triplé en deux ans. Didier Migaud, le président de la Cour des Comptes, a ainsi rappelé que « ce déficit des comptes sociaux est une anomalie ». Il préconise donc un retour à l’équilibre selon « un calendrier rapproché » qui passerait par l’intensification de « la maîtrise des dépenses sociales, notamment d’assurance-maladie » et l’augmentation des recettes « en agissant prioritairement  sur les niches fiscales ». Didier Migaud a d’ailleurs salué les mesures de rigueur proposées par François Fillon et qui rapporteront 6,5 milliards d’euros l’année prochaine à l’assurance-maladie.

Depuis 2007, l’apport net a été de l’ordre de 50 médecins en zones déficitaires. La Cour des comptes pointe donc des « effets d’aubaine importants » et préconise un plafonnement du montant de l’aide. De plus, « la Cour propose d’introduire une modulation généralisée de la prise en charge des cotisations sociales des médecins, y compris ceux déjà installés,  en fonction de leur répartition territoriale. » Par ailleurs, elle regrette qu’« aucune mesure de régulation de l’installation de médecins en zones surdotées » n’ait été prise à ce jour.

Un creux démographique de courte durée devrait intervenir en 2019 avec un niveau plancher de 188 000 médecins, mais les projections sont optimistes avec un nombre évalué entre 247 000 et 256 000 pour 2060. Cette tendance pousse la Cour à s’interroger sur un abaissement à très court terme du numerus clausus. « Il faut remettre à plat les perspectives démographiques récentes et repenser la répartition des étudiants entre spécialités, et j’y inclus bien sûr la médecine générale », s’est ainsi expliqué Antoine Durrleman, président de la 6echambre de la Cour des comptes. Le rapport propose également de réguler les flux de formation en « réduisant le nombre de postes ouverts aux ECN et en diminuant les redoublements de complaisance ».

Un effort sur la maîtrise des dépenses de médicaments

La Cour des comptes déplore le faible développement des génériques par rapport aux autres pays européens. « Les multiples dispositifs contractuels mis en place n’ont pas substantiellement infléchi une culture de prescription qui privilégie les médicaments récents et chers. » Sur les 36 milliards d’euros dépensé en médicaments en 2009, trois quarts sont des médicaments remboursables dispensés en ville. Ainsi, le rapport préconise la mise en place d’« un mécanisme de régulation de la prescription qui implique directement les médecins ».

La Cour s’est également interrogée sur les marges de progrès possibles en matière de gain de productivité. Elle note ainsi qu’« une dématérialisation totale des feuilles de soins papier » alors que leur utilisation est encore fréquentes chez les médecins spécialistes, « aboutirait selon la Cnamts à une économie équivalente à 6 000 postes ».

De même, « la dématérialisation (des ordonnances Ndlr),  soit quelques 500 millions de prescriptions pharmaceutiques, permettrait aussi des gains significatifs ». Sur ce dernier point, Antoine Durrleman a précisé que « des négociations devraient alors être entamées avec les professionnels de santé, un nouvel équipement devrait également être mis en place ». En guise de conclusion, il a tenu à rappeler que sur les trois derniers rapports de la Cour des comptes concernant la sécurité sociale, 2/3 des recommandations avaient été suivies.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Concepcion Alvarez