Patient-traceur, avis d’efficience, nouveaux critères de certification… La Haute autorité de santé a dévoilé ses projets.

 

Dans un contexte de recomposition du paysage sanitaire français et de restriction budgétaire, la Haute autorité de santé (HAS) vient de présenter son projet stratégique 2013-1019, avec pour fil rouge la volonté “d’ajouter l’efficience à la qualité”. Pour cela, la HAS va recentrer son programme de travail sur les grands enjeux de santé publique (cancer, santé mentale, vieillissement…) et essayer d’améliorer le parcours de soins. “Nous devons être acteur de l’organisation et de la régulation des soins et non plus seulement expert scientifique”, a déclaré le Pr Jean-Luc Harousseau, président de l’agence.

 

Patient-traceur

La méthode originale du patient-traceur, développée aux Etats-Unis et au Canada, sera notamment utilisée lors du prochain cycle de visites de certification. Elle consiste à choisir des malades atteints de pathologies complexes ayant été hospitalisés dans un établissement, de les interroger, avec leur accord, et de rencontrer les professionnels, afin de reconstituer leur parcours, y compris avant et après leur hospitalisation, et de repérer un éventuel dysfonctionnement dans la continuité des soins, la prise en charge de la douleur… Ce nouvel indicateur pour la certification des établissements peut devenir un outil d’amélioration de la qualité des soins à l’hôpital et de la coordination entre professionnels de santé. La méthode du patient-traceur devrait d’ailleurs être développée également en médecine de ville, pour évaluer et améliorer les pratiques des équipes professionnelles. “C’est une méthode très prometteuse, a confié le Dr Michel Varroud-Vial. Cinq ou six patients suffisent pour avoir des informations très révélatrices sur le fonctionnement d’un système de prise en charge”.

Des données concrètes sur la sécurité des soins vont être ajoutées également aux indicateurs pour la certification. Elles incluront probablement les données de mortalité. Pour améliorer la transition ville-hôpital, la HAS va encourager, par ailleurs, l’établissement d’un compte-rendu de fin d’hospitalisation, à remettre systématiquement au patient lors de sa sortie. L’agence travaille à l’élaboration de ce document standardisé, qui fera partie, lui aussi, des critères d’évaluation pour l’accréditation des établissements. Les données actualisées de ces évaluations, par établissement, devraient être consultables, dès fin 2013, sur un nouveau site internet, destiné au grand public.

Un “compte-qualité”, intégrant les éléments clés d’une démarche d’amélioration, va être ouvert pour chaque établissement. Son objectif est de faciliter le suivi du programme qualité et sécurité des soins.

La HAS souhaite, enfin développer le dispositif d’accréditation pour les praticiens exerçant une spécialité à risque. Ce dispositif, expérimenté depuis six ans, a recueilli 11 000 demandes d’accréditation et permis l’accréditation de 7000 médecins. Il a pour vocation d’être étendu à l’ensemble des médecins, en commençant par ceux travaillant en équipes.

 

Médicaments : bientôt les premiers avis d’efficience

Efficience, efficient. Ces termes reviennent 48 fois dans le texte du projet stratégique 2013-2016 de la Haute autorité de santé, qui place ainsi sans ambiguïté la dimension économique au cœur de ses préoccupations. Témoin de cette évolution, le 3 octobre 2013 la HAS s’engage officiellement dans sa nouvelle mission d’évaluation de l’efficience des médicaments les plus innovants et les plus coûteux.

Il s’agit d’évaluer l’intérêt du médicament pour la communauté en prenant en compte non seulement le gain d’efficacité, mais aussi la différence de coût par rapport aux stratégies existantes. Cette évaluation médico-économique, inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2012, sera réalisée par la Commission d’évaluation économique et de santé publique (Ceesp). Elle aura lieu en même temps que l’évaluation médicale effectuée par la Commission de transparence en vue de l’admission au remboursement.

Ce nouveau critère d’efficience ne risque-t-il pas d’influencer les avis médicaux rendus par la Commission de transparence ? “Notre évaluation se fera parallèlement et en toute indépendance, sans arrière-pensée comptable”, assure le Pr Gilles Bouvenot, président de la Commission de transparence.

 

La fin des Asmr

Les avis d’efficience seront transmis au Comité économique des produits de santé chargé de fixer les prix. Cette procédure s’applique aux nouveaux médicaments sélectionnés par le collège de l’HAS, sur la base de deux critères : une Asmr I, II ou III revendiquée par l’industriel et un impact significatif sur les dépenses (notamment chiffre d’affaire prévisible d’au moins 20 millions d’euros TTC sur deux ans). Un petit nombre de médicaments sont concernés, mais ceux-ci représentent 90 % des remboursements pour les ASMR I, II, ou III. Une vingtaine de dossiers ont déjà été déposés et les premiers avis d’efficience devraient être disponibles début 2014. Il est à noter qu’un avis d’efficience globale sur les antihypertenseurs, réalisé sur saisine du ministère, a été présenté en mai 2013.

“De plus en plus l’évaluation du médicament doit se faire par rapport aux thérapeutiques existantes”, a estimé le Pr Harousseau. Dans ce cadre les notions de SMR et d’Asmr pourraient être remplacées prochainement par celle d’index thérapeutique relatif (ITF).

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Dr Chantal Guéniot