Au-delà de la simplification récente du calendrier vaccinal, deux mesures pourraient jouer un rôle important pour l’amélioration de la couverture vaccinale, selon le Pr Daniel Floret, président du Comité technique des vaccinations/ Haut Conseil de la Santé Publique.

Egora.fr : La résurgence de la rougeole souligne à quel point il est difficile d’obtenir des couvertures vaccinales suffisantes contre certaines maladies. Ces lacunes viennent-elles plutôt des parents ou des médecins, sont-elles dues à la méfiance ou à la négligence ?

Pr Daniel Floret : Le nombre de vrais opposants aux vaccinations est faible, de l’ordre de quelques pour cent. weighted blanket autism En revanche une partie de la population a besoin de discuter pour être convaincue. Les mesures d’incitation et d’explication n’ont pas tellement d’effets quand elles viennent des autorités de santé. L’acteur clé c’est le médecin traitant, qui doit prendre le temps de discuter, avec les bons arguments, notamment pour cette frange des indécis, qui ont besoin d’être rassurés sur les effets secondaires. Mais cela demande d’y consacrer du temps et tous les médecins ne sont pas disposés à le faire. Et puis la négligence joue un rôle important, des deux côtés.

Comment vaincre cette inertie ?

Les campagnes d’incitation ne peuvent pas suffire. Je pense que deux types de mesures pourraient être prises, qui auraient un impact important. La première serait de simplifier le parcours vaccinal et la seconde de vacciner sur les lieux de vie. Il y a des catégories de personnes très difficiles à vacciner, comme les adolescents et les adultes jeunes, qui vont peu chez le médecin. Vacciner dans les établissements scolaires, à l’université, sur les lieux de travail permettrait d’atteindre ces catégories de population. Cela améliorerait les taux de vaccination pour les vaccins un peu difficiles à appliquer, comme le vaccin contre la coqueluche, et permettre un rattrapage pour le vaccin contre la rougeole. Pour le vaccin HPV, l’Angleterre et l’Australie qui ont organisé la vaccination en milieu scolaire, ont obtenu une couverture vaccinale satisfaisante. C’est uniquement une question de volonté politique.

N’y aurait-il pas des réticences des parents, après la polémique sur la vaccination contre l’hépatite B ?

Ce qui a arrêté la vaccination contre l’hépatite B dans les établissements scolaires, ce n’est pas la méfiance des parents, mais la décision prise par Bernard Kouchner face à la pression des médecins scolaires. Ceux-ci ne voulaient plus vacciner pour des raisons de responsabilité.

Comment simplifier le parcours vaccinal ?

Aujourd’hui pour se faire vacciner il faut aller chez un médecin, qui prescrit le vaccin, puis se rendre à la pharmacie avec l’ordonnance et retourner chez le médecin pour avoir l’injection. On peut simplifier le parcours de deux façons. La première est d’autoriser les médecins à conserver des vaccins dans leur cabinet. Cela faisait partie des mesures préconisées dans le programme d’amélioration de la couverture vaccinale de la Direction Générale de la Santé (DGS) et des recommandations du Haut Conseil de la santé publique (Hcsp). where to buy weighted blanket Certains médecins ont déjà des vaccins dans leur cabinet et je pense que beaucoup seraient favorables à cette mesure. Mais les pharmaciens y sont très hostiles. La deuxième est d’autoriser la réalisation des vaccinations dans les pharmacies. Cela sous-entend que quelqu’un soit formé dans l’officine pour vacciner. Cela se fait dans certains pays, comme le Portugal ou la Suisse. Là ce sont les médecins qui sont opposés. Mais il serait possible aussi d’associer ces deux mesures. Peut-être que médecins et pharmaciens reconnaitraient qu’ils peuvent en tirer un bénéfice et en tout cas le patient serait gagnant. Le développement d’un carnet de vaccination électronique pour les adultes aurait également un impact important. Mais on connait les difficultés que rencontre la mise en place du dossier médical partagé.

La couverture vaccinale est excellente pour les vaccins du nourrisson. Quels sont les points noirs de la vaccination ?

Seulement 30 % des jeunes filles de 15 à 17 ans ont reçu les trois doses de vaccin HPV, alors qu’en Australie et en Angleterre la couverture est de 80 %. En ce qui concerne le méningocoque C, le taux de couverture est de 50 % chez les jeunes enfants et l’incidence de la méningite dans cette tranche d’âge a diminué. En revanche, chez les adolescents et adultes jeunes, la couverture est ridicule, de l’ordre de 10 %, ce qui explique qu’il n’y ait pas d’immunité de groupe. Actuellement l’incidence des méningites à méningocoque C augmente chez les nourrissons, que l’on avait choisi de ne pas vacciner parce qu’ils étaient censés être protégés par l’immunité de groupe, et chez les adultes. Si les recommandations avaient été suivies, nous aurions obtenu une immunité de groupe et le problème des épidémies de méningites C aurait été résolu, comme dans tous les pays qui ont vacciné correctement : l’Angleterre, l’Espagne, les Pays-Bas…Actuellement nous sommes dans le pire des cas de figure : nous payons le vaccin, puisque la moitié des enfants sont vaccinés, mais nous continuons aussi à payer le prix de la maladie. Pour la coqueluche, la couverture vaccinale est très bonne chez les enfants, mais il faudrait l’améliorer chez les adultes, notamment par la stratégie du cocooning. La vaccination antigrippale est également insuffisante chez les personnes à risque et la couverture baisse.

Quelles est la situation pour le vaccin contre la rougeole ?

Pour éliminer la rougeole, il faudrait que 95 % de la population soit immunisée. On n’en est loin. Chez les nourrissons la couverture est de 90 % à une dose et 60 % à deux doses. Le rattrapage est mal fait chez les adolescents et les adultes jeunes, qui représentent un réservoir important de personnes non immunisées. Il faut observer aussi que la couverture est moins bonne dans le sud de la France, où sont installés beaucoup de médecins à pratique particulière et, parmi eux, des antivaccinaux. La solution dans ce cas est locale et doit passer par les ARS, qui ont la capacité de réunir les différents intervenants autour d’une table. Certaines ARS sont prêtes à se mobiliser.

Comment évolue la vaccination contre l’hépatite B ?

La couverture vaccinale augmente de manière très sensible chez les nourrissons et les jeunes enfants depuis que le vaccin hexavalent est remboursé. Malheureusement, il n’y a pas vraiment de rattrapage chez les grands enfants et les adolescents, qui vont bientôt arriver dans la période de risque et qui sont couverts à 40 ou 50 % seulement. Mais nous allons parvenir à terme à une bonne protection, puisqu’actuellement la couverture vaccinale est excellente chez les jeunes enfants. C’est vraiment un élément de satisfaction.

N’y a-t-il pas un problème particulier de vaccination parmi le personnel soignant ?

Si, en particulier chez les infirmières, qui sont nettement moins bien vaccinés que les médecins. Je suis convaincu qu’elles sont baignées dans un discours antivaccinal, ou en tout cas non provaccinal, au cours de leurs études. On ne leur parle pas de la vaccination en terme positif. Il est scandaleux de voir des rougeoles ou des coqueluches nosocomiales. Les vaccins obligatoires sont bien appliqués, mais les médecins du travail n’insistent pas assez pour les vaccins recommandés. Peut-être faudrait-il être plus directif.

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne

La Déclaration Publique d’Intérêt du Pr Floret est consultable sur www.hcsp.fr