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UN AUTRE MONDE…
S’il y a deux mois un lanceur d’alerte nous avait prédit une pandémie qui mettrait à mal notre économie, notre système de santé, que certains d’entre nous perdraient la vie pour être montés au front, l’obligation de ficher les français pour leurs contacts afin d’éviter une deuxième ou troisième vague de cette pandémie meurtrière, l’impossibilité pendant des mois d’avoir recours à des examens ou à des actes chirurgicaux liée à une pénurie mondiale de produits anesthésiants,… qu’aurions nous dit de ce lanceur d’alerte ? Qu’il s’agissait d’un nouveau colporteur de fakenews !
Et bien non, ce lanceur d’alerte aurait eu raison.
Pour les 18 mois à venir, l’enjeu crucial sera le Contact Tracing, pierre angulaire du déconfinement. De sa réussite ou de son échec, mais aussi de la capacité de la population à respecter la stratégie gouvernementale, dépendra la venue ou l’absence d’une deuxième ou d’une troisième vague de Covid-19.
Notre rôle n’est pas de remettre en cause cette stratégie car nous pourrions avoir 60 millions de comités scientifiques en France. Même si nous avons identifié certaines incohérences, nous avons compris que cette politique est le fruit des carences majeures qui ont frappé notre système de santé depuis 20 ans. Bon nombre des mesures prises depuis le début de cette pandémie prennent en compte le manque de masques, de tests virologiques, de produits anesthésiants, … .
S’agissant d’enquêtes épidémiologiques de personnes en ambulatoire, le médecin généraliste doit être le pivot de cette politique tant pour la prise en charge des patients contaminés que pour les membres de la cellule familiale et pour les contacts. Bien sûr, il ne travaillera pas seul, mais il se coordonnera avec les autres professionnels de santé de son territoire.
Même si elles ont trop peu souvent été mises sur le devant de la scène, depuis le 15 mars des centaines d’organisations territoriales, parfois départementales, ont vu le jour pour prendre en charge les patients contaminés, leurs proches, et en assurer le suivi.
Ces organisations sont de nature diverses : maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS), équipe de soin primaire (ESP), plate-forme territoriale d’appui (PTA), Centre Covid. Toutes ont au moins un point commun : elles prennent en charge avec une très grande réactivité la totalité de la population d’un territoire, y compris celle qui n’a pas de médecins traitants, en lien avec les secteurs sanitaires, social et médico-social.
Ce maillage territorial au plus près de la population doit être un élément déterminant du plan stratégique de déconfinement du gouvernement et il faut éviter les erreurs de 2009 lors de l’épidémie de grippe H1N1 où les médecins généralistes avaient été écartés du plan mis en place. Toutes les enquêtes le montrent, les français accordent une très grande confiance à leurs médecins généralistes et aux autres professionnels de santé de terrain. Cette confiance est primordiale pour permettre aux français d’accepter de participer aux enquêtes sanitaires qui seront réalisées afin de juguler la propagation du virus et éviter ainsi d’autres vagues épidémiques.
Le temps est compté. Nous avons à peine dix jours pour nous organiser et nous approprier ce plan de déconfinement qui nous amène vers un nouveau monde car il concerne tout le territoire national et risque de durer de longs mois.
Dr Luc DUQUESNEL,
Président Les Généralistes CSMF
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