VOUS AVEZ DIT SYNDICAT POLYCATÉGORIEL ?

Depuis quelques mois, un projet de création d’un nouveau syndicat de spécialistes agite le microcosme du syndicalisme médical libéral. Il s’agirait de mettre au rebut les syndicats dits polycatégoriels en créant un syndicat qui rassemblerait toutes les spécialités médicales, y compris la spécialité de médecine générale si elle le souhaite.Au-delà de la contradiction de vouer aux gémonies la notion de syndicat polycatégoriel pour en créer de facto un nouveau, on ne peut pas se désintéresser des motivations d’un tel projet qui sont le témoignage d’un véritable malaise qui traverse aujourd’hui l’ensemble de la médecine libérale.

La première justification serait que tous les yeux du Ministère de la Santé et de l’Assurance Maladie seraient braqués sur les seuls médecins généralistes. En fait, et c’est le cas dans la plupart des pays développés, la désorganisation de notre système de santé vient d’un manque de coordination entre les professionnels de santé dits des soins primaires. Le vieillissement de la population, avec son cortège de patients polypathologiques, a fait de la réorganisation de cette « première ligne » la priorité afin de diminuer le recours inutile et couteux à l’hôpital. Enfin, si la convention médicale de 2016 a été présentée comme une convention de rattrapage pour les médecins généralistes, ces effets se font attendre puisque ces deux dernières années les revenus des médecins généralistes croissent moins que ceux de la moyenne des autres spécialités médicales.

Cette volonté de créer un nouveau syndicat est souvent apparue comme étant le souhait d’opposer la médecine générale à toutes les autres spécialités médicales. Ne s’agit-il pas là d’un raccourci simpliste et démagogique et si nous devions vraiment différencier plusieurs catégories au sein de la médecine libérale, les frontières ne seraient-elle pas autres ? Spécialités cliniques versus spécialités médico techniques ? Spécialités ambulatoires versus spécialités en établissement de soins ? Beaucoup plus de choses séparent un pédiatre d’un radiologue ou d’un anesthésiste, qu’un pédiatre d’un médecin généraliste. De même pour un endocrinologue, un psychiatre, un gynécologue médical ou un gériatre. Si chaque spécialité médicale a son niveau d’expertise, au moins un élément rassemble l’ensemble des spécialités cliniques : elles ont été pendant des dizaines d’années les grandes oubliées des différentes conventions médicales ce qui en fait aujourd’hui les spécialités avec les plus faibles revenus et ceci n’est pas acceptable.

Bien sûr, le morcellement de la représentation syndicale n’est pas un gage d’efficacité, mais en créant un nouveau syndicat n’aggrave-t-on pas la situation actuelle ?

Si, lorsque l’on se sent en danger, le repli sur soi est un réflexe habituel et identitaire, il se ferait au détriment de bon nombre de spécialités médicales et tout particulièrement celles qui sont aujourd’hui les moins en vue.

La défense de la médecine libérale ne peut se faire qu’au travers d’un grand syndicat polycatégoriel représentant l’ensemble des spécialités médicales sans les opposer les unes aux autres. La CSMF est ce syndicat et c’est pour cette raison que notre syndicat, Les Généralistes-CSMF, a rappelé à l’unanimité lors de son dernier comité directeur son attachement à la CSMF. Chaque médecin, quel que soit sa spécialité, doit avec son expertise œuvrer à un exercice coordonné pour permettre à chaque patient d’avoir un parcours de santé efficace et efficient.

Dr Luc DUQUESNEL,
Président Les Généralistes CSMF