Le décret permettant aux pharmaciens d’officine de délivrer des antibiotiques pour traiter angines et cystites sans ordonnance, après réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique (Trod), est paru ce mardi 18 juin au Journal officiel. Le texte précise les conditions de mise en œuvre de cette nouvelle compétence.
La parution de ce texte était particulièrement attendue des pharmaciens. Le décret permettant aux pharmaciens d’officine ayant suivi une formation de délivrer sans ordonnance les antibiotiques nécessaires pour traiter les angines et cystites, après réalisation d’un Trod (positif), est enfin paru au Journal officiel ce mardi. Il entre en vigueur dès aujourd’hui. Deux situations sont distinguées dans ce texte : le patient se présente muni d’une ordonnance de dispensation conditionnelle ou le patient se présente spontanément.
Un arrêté paru concomitamment précise que le pharmacien doit s’assurer, avant de procéder aux tests (tests rapides oro-pharyngés d’orientation diagnostique des angines à streptocoque du groupe A et des tests urinaires d’orientation diagnostique de recherche a minima de nitriturie et de leucocyturie), que le patient qui s’est présenté spontanément à son officine “ne présente pas de critères d’exclusion d’urgence, d’autres critères d’exclusion ou de signes de gravité”.
Ainsi, le pharmacien ne pourra pas prendre en charge un patient se présentant avec des symptômes évocateurs d’angine s’il est âgé de moins de 10 ans, en cas d'”antibiothérapie en cours pour une autre raison”, d'”épisode similaire dans les 15 jours précédents”, de “retour de voyage en pays tropical depuis 2 à 5 jours et vaccination antidiphtérique non à jour ou non renseignée”, de “grossesse avérée ou non exclue”, d'”éruption cutanée associée chez un enfant (moins de 15 ans)”, etc.*
Si une patiente âgée de 16 à 65 ans se présente spontanément à l’officine avec des symptômes évocateurs de cystite, le pharmacien devra s’assurer de l’absence de critères d’exclusion d’urgence : une “fièvre rapportée par la patiente (> 38 °C) ou hypothermie (ou < 36 °C) ou frissons”, et d'”autres symptômes suggérant une pyélonéphrite : douleurs au niveau des fosses lombaires ou au niveau des flancs/vomissements/diarrhées/douleurs abdominales”.
D’autres critères peuvent exclure une prise en charge par le pharmacien, notamment des “signes d’appel gynécologique : leucorrhées, prurit vulvaire ou vaginal”, des “cystites à répétition” ( > ou = 3 épisodes dans les 12 derniers mois), une “anomalie fonctionnelle ou organique de l’arbre urinaire”, etc.*
L’arrêté liste également les questions que le pharmacien doit poser dans le cadre de la vérification de l’éligibilité dans les deux situations (symptômes évocateurs d’angine ou de cystite).
S’agissant de l’angine, le pharmacien pourra délivrer à un adulte : amoxicilline, céfuroxime (sous forme de céfuroxime axétil), cefpodoxime, azithromycine, clarithromycine, josamycine. Pour enfant : amoxicilline, cefpodoxime proxétil, azithromycine, clarithromycine, et josamycine. Dans le cas de la cystite aiguë simple chez la femme, il pourra délivrer sans ordonnance fosfomycine trométamol et pivmecillinam.
Une formation obligatoire
Les pharmaciens qui souhaiteraient délivrer des antibiotiques dans ce cadre devront avoir suivi une formation dispensée par un organisme de formation “dont les ressources ou l’organisation garantissent une indépendance à l’égard des entreprises fabriquant ou distribuant des produits de santé, et respectant les objectifs pédagogiques fixés” par l’arrêté s’ils n’ont pas déjà bénéficié d’un enseignement relatif à la mission dans le cadre de leurs études par exemple, stipule le décret. L’arrêté précise les dispensations possibles.
Le texte présente aussi le cahier des charges des formations. Dans les deux cas (angine et cystite), une formation théorique et pratique est nécessaire. Parmi les compétences requises, citons, pour l’angine, les critères d’exclusion, le score de Mac Isaac, le Trod angine et la prescription ; pour la cystite, les critères d’exclusion, l’interprétation du test urinaire d’orientation diagnostique de recherche a minima de nitriturie et de leucocyturie et la prescription. Une attestation de formation est obligatoire.
Le texte précise enfin le cahier des charges relatif aux conditions techniques pour la réalisation des Trod. Par exemple, pour la cystite, “disposer de sanitaires permettant d’assurer la réalisation” du Trod “dans le respect des règles d’hygiène”.
Remplissage du DMP
Le décret stipule par ailleurs que le pharmacien est tendu d’inscrire dans le dossier médical partagé (DMP) du patient toute une série d’informations (ses nom et prénom, la date de réalisation du Trod, l’identification unique du test ou, à défaut, le nom du fabricant et la référence et le numéro du lot du test). “En cas de test positif ayant donné lieu à délivrance de médicament, une attestation est remise au patient comportant la dénomination du médicament, sa posologie et la durée du traitement”, précise le texte. Cette information doit aussi figurer dans le DMP. Doit être ajoutée la mention “‘délivrance sans ordonnance à la suite d’un test rapide d’orientation diagnostique positif’, suivie du nom du pharmacien ayant réalisé le test, en lieu et place du nom du prescripteur”.
S’il n’est pas possible de verser ses informations dans le DMP, “le pharmacien transmet cette attestation au médecin traitant. La transmission de cette information s’effectue par messagerie sécurisée de santé”.
Quelle rémunération ?
Un autre arrêté, également paru ce mardi, précise la tarification des prestations réalisées par les pharmaciens. Pour la réalisation des tests d’orientation diagnostique ne donnant pas lieu à une dispensation du médicament compte tenu du résultat du test : 10 euros toutes taxes comprises ; pour la réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique donnant lieu à une dispensation du médicament compte tenu du résultat du test : 15 euros toutes taxes comprises. Si le patient est initialement orienté par son médecin (ou une sage-femme dans le cas de la suspicion de cystite) et muni d’une ordonnance conditionnelle, le test est facturé 10 euros quel que soit le résultat.
La revalorisation de la rémunération de ces tests a été obtenue par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), qui a conclu lundi 10 juin un accord conventionnel avec l’Assurance maladie. Les tests d’orientation diagnostiques étaient jusqu’alors rémunérés 6 euros.
Interrogé par l’AFP, le président de la FSPF, Philippe Besset, a indiqué que les premières délivrances directes en officine pourraient intervenir “d’ici 15 jours”, le temps que les premiers pharmaciens effectuent leurs formations en ligne.
* Liste complète à retrouver en annexe de l’arrêté.
Source :
www.egora.fr
Auteur : Louise Claereboudt
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