Selon les projections de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) qui publie, en ce mois de septembre, une vaste étude sur la démographie médicale, le nombre de praticiens en France devrait stagner jusqu’à 2030, avant de fortement augmenter jusqu’à 2050. Si la médecine générale verra ses effectifs croître fortement d’ici trente ans, d’autres spécialités médicales vont, à l’inverse, régresser. Des effectifs qui ne permettront pas toujours de résorber les problèmes de densité médicale… État des lieux.

 

Déserts médicaux, délais d’attente interminables, surcharge de patients… Depuis des années, les sujets de démographie médicale secouent et inquiètent médecins, élus des territoires et responsables politiques. Beaucoup espèrent que les efforts mis sur le numerus clausus par les ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur, puis sur le numerus apertus, porteront leurs fruits. Car désormais, dans le cadre de la réforme du premier cycle des études de médecine, des objectifs nationaux pluriannuels de formation sont déterminés pour cinq ans. Ils visent à définir un nombre d’étudiants admis dans les études de santé en fonction des besoins de chaque territoire, et donc permettre d’endiguer le phénomène de désertification médicale.

Combien de praticiens exerceront alors dans dix, vingt, trente ans ? Pour tenter de répondre à cette question, les équipes de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) viennent de publier des projections sur les effectifs de médecins à l’horizon 2050. Ce scénario tendanciel est calculé en prenant en compte 8.700 étudiants admis en deuxième année de médecine tous les ans et un flux de 1.200 praticiens diplômés à l’étranger commençant une activité en France chaque année.

 

 

En fonction de ces données, les services du ministère de la Santé estiment donc d’abord que les effectifs de médecins, toutes spécialités confondues, vont stagner jusqu’à 2030, plus particulièrement jusqu’à 2028. Puis, une hausse significative sera observée entre 2030 et 2050 : la croissance moyenne annuelle des effectifs sera d’environ +1,5%. Il y aura 210.429 médecins au total l’an prochain, en 2022, et 209.338 médecins en 2025, 211.378 en 2028 et 215.016 en 2030. En 2050, la Drees estime qu’il y aura 291.790 praticiens au total.

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Légende : Estimation du nombre total de médecins d’ici 2050.

Médecine générale : des effectifs en forte hausse

Les estimations concernant la médecine générale suivent parfaitement cette tendance. Le scénario tendanciel pour cette spécialité marque, en effet, une croissance relativement importante à partir de 2030. Il y aura 94.350 médecins généralistes en 2022 selon ces prévisions, 92.765 en 2028, 93.881 en 2030 et 129.152 en 2050.

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Légende : Estimation du nombre de médecins généralistes d’ici 2050.

Dans le détail, la pénurie de médecins généralistes devrait se faire le plus sentir en 2026, avec seulement 92.298 praticiens, avant de remonter à 92.427 en 2027 puis de décoller à partir de 2030.

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Légende : Estimation du nombre de médecins généralistes entre 2022 et 2030.

 

 

Autres spécialités : les gagnants et les perdants

Si l’on compare la médecine générale aux autres spécialités ainsi qu’à l’ensemble des médecins, on observe également la même tendance : une nette augmentation des effectifs d’ici huit ans. En revanche, il n’y aura que 115.956 médecins en 2023, contre 116.078 cette année et 163.639 en 2050.

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Plus précisément, la grosse majorité des spécialités vont suivre une courbe croissante de médecins d’ici trente ans. Seules certaines exceptions, comme la chirurgie, la pédiatrie ou la pneumologie vont, à l’inverse, observer une pénurie, descendant en-dessous du seuil actuel.

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Spécialité boostée par la crise sanitaire liée au Covid, l’anesthésie-réanimation verra enfin ses effectifs passer de 11.738 en 2022 à 17.904 en 2050.

 

 

Densité des médecins dans les territoires : une situation contrastée

Compte tenu de cette importante hausse des effectifs, la densité de médecins dans les territoires, elle, est aussi amenée à évoluer, selon les estimations de la Drees. A l’heure actuelle, les littoraux français sont les espaces où la densité médicale est la plus forte. A l’inverse, le centre du pays propose la plus faible densité de praticiens à ses habitants.

Pour une analyse plus fine et rester en cohérence avec la localisation des centres hospitaliers universitaires, la Drees a réalisé ses projections selon les anciennes régions. Ainsi, au niveau de l’ensemble des médecins, on observe d’abord que le Sud-Ouest va se dédensifier au profit du Nord et du Grand-Est. En 2050, le Centre, les Pays-de-la-Loire et Poitou ainsi que la Picardie seront les territoires où la concentration de médecins sera la moins importante.

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Légende : Densité de médecins – toutes spécialités confondues – en France en 2022, 2030 et 2050.

Grille de lecture: Si on classe les régions par ordre de densité croissant, le 1er quartile correspond aux 25 % de régions dont la densité est la plus faible,
le 2e quartile aux 25 % de régions classées immédiatement au-dessus, le 3e aux 25 % de régions classées au-dessus de celles du 2e quartile
et, enfin, le 4e correspond aux 25 % de régions dont la densité est la plus élevée.

Le constat concernant la densité de médecins généralistes est un peu différent. Même avec 30.000 praticiens de plus (tous types d’exercice confondus), les déserts médicaux ne seront pas endigués. Dans les années à venir, Paca et Midi-Pyrénées vont rester deux régions avec une forte concentration de médecins mais l’Aquitaine et le Languedoc-Roussillon vont en perdre. En 2050, la Picardie, l’Île-de-France, le Centre, l’Auvergne et la Franche-Comté seront les territoires avec la plus faible densité de MG.

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Enfin, bien que le nombre de médecins spécialistes augmente également dans les années à venir, leur densité dans les territoires est amenée à réduire fortement partout, excepté en Île-de-France, Paca, Alsace et Nord-Pas-de-Calais.

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Source :
www.egora.fr
Auteur : Marion Jort

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