Chaque année, le comité des Ig Nobel décerne un prix à dix recherches scientifiques hilarantes, de prime abord, mais qui amènent finalement à réfléchir. Pour cette trentième édition, la cérémonie s’est déroulée en téléconférence, mesures sanitaires obligent.

 

Si l’épidémie de coronavirus a forcé les Ig Nobel à se tenir virtuellement, et non au Sanders Theatre de l’université Harvard comme à son habitude, la cérémonie n’a toutefois rien perdu de sa superbe. Présentée par l’incontournable Marc Abrahams, célèbre mathématicien, éditeur et co-fondateur du magazine Improbable Research, la remise des prix a tenté de reprendre ses traditionnels codes : des costumes farfelus, un orchestre quelque peu douteux, des avions en papier, mais aussi des mini-sketchs, suivis par la présentation des travaux scientifiques… tout aussi loufoques.

Le thème de cette année était “bugs”, un “mot à plusieurs sens”, comme l’a correctement fait remarquer le Pr Abrahams : un insecte, un virus, un bug informatique, voire une Volkswagen. Les lauréats recevaient plusieurs prix cette année : un cube en papier, une sorte de diplôme signé par les précédents gagnants, ainsi qu’un billet de 10.000 milliards de dollars zimbabwéens, une monnaie qui ne vaut plus rien à cause de l’hyperinflation.

 

 

Pour commencer, le prix de l’Acoustique a été remis à une équipe de chercheurs venus des quatre coins du monde qui ont montré, grâce à une expérience dans une caisse étanche, que l’air enrichi en hélium pouvait affecter les vocalisations d’une femelle alligator, l’un des animaux non-aviaires les plus bruyants. En psychologie, le prix est revenu à Miranda Giacomin et Nicholas Rule, qui ont mis au point une méthode permettant d’identifier les personnes narcissiques en examinant uniquement leurs sourcils. Prenez garde à l’épilation…

 

Quand les vers de terre changent de forme

La France, quant à elle, a été mise à l’honneur aux côtés de l’Australie, l’Ukraine, l’Italie, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Afrique du Sud pour le prix de Physique. Cette équipe a observé des modifications de la forme du ver de terre lorsque celui-ci est exposé à des vibrations à haute fréquence. L’Américain Richard Vetter s’est vu remettre le prix d’Entomologie pour avoir recueilli des preuves que de nombreux entomologistes (scientifiques qui étudient les insectes) ont peur des araignées.

Coté médecine, Nienke Vulink, Damiaan Denys, et Arnoud van Loon, ont reçu un Ig Nobel pour leurs travaux sur la misophonie : ce trouble neuropsychique, peu diagnostiqué mais commun, caractérisé par une aversion à certains sons, comme les bruits provoqués par la mastication.

Parmi les autres expériences complètement déjantées, une équipe anglo-saxonne formée par Metin Eren, Michelle Bebber, James Norris, Alyssa Perrone, Ashley Rutkoski, Michael Wilson, et Mary Ann Raghanti s’est attachée à reproduire l’invention d’un Inuit qui a fabriqué un couteau à partir de ses propres excréments congelés. Finalement, les experts ont montré que cela ne fonctionnait pas. Ils obtiennent le prix de Sciences des matériaux.

 

 

Des bisous pour lutter contre les inégalités ?

Notre pays s’est également illustré en Économie au sein d’une équipe internationale. Celle-ci s’est intéressée au rapport entre les inégalités socio-économiques d’un pays et la fréquence des baisers sur la bouche dans ce pays. Malheureusement, arrêter de s’embrasser sur la bouche ne permettra pas de mettre fin aux inégalités, explique l’un des chercheurs, Christopher Watkins.

En Management, Xi Guang-An, Mo Tian-Xiang, Yang Kang-Sheng, Yang Guang-Sheng, et Ling Xian Si, cinq tueurs à gage chinois ont reçu le fameux billet zimbabwéen. Le motif : ces derniers se sont sous-traités à tour de rôle pour réaliser un meurtre qui n’a finalement pas été commis.

 

Trump, Johnson, et Bolsonaro dans le viseur

Si le but de cette cérémonie est de rire, il l’est tout autant de réfléchir. Et cette année, les organisateurs ont tenu à nous alerter sur les comportements de certains politiques en pleine pandémie de Covid-19. Sont cités : Jair Bolsonaro, président du Brésil, Boris Johnson, premier ministre britannique, Narendra Modi, premier ministre de l’Inde, Andrés Manuel López Obrado, président mexicain, Alexandre Loukachenko, président de la République de Biélorussie, Donald Trump, à la tête des Etats-Unis, Recep Tayyip Erdogan, président de la Turquie, Vladimir Poutine, président de la Russie, et Gurbanguly Berdimuhamedow, du Turkménistan. Ces derniers ont été primés en éducation médicale pour avoir “appris au monde entier que les responsables politiques peuvent avoir un effet plus immédiat sur la vie et la mort que les scientifiques et les médecins”.

 

 

Après un interlude musical, – mini-opéra au doux nom de “Rêve comme un cafard” -, Marc Abrahams a également félicité, non sans ironie, les Gouvernements de l’Inde et du Pakistan, lauréats du prix pour la Paix, pour avoir “sonner furtivement au milieu de la nuit, à leurs portes respectives au milieu de la nuit, avant de fuir sans que quelqu’un n’ait le temps de répondre”. Un tacle aux deux nations qui entretiennent des relations plus que tumultueuses.

 

 

Source :
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Auteur : Louise Claereboudt

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