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À Marseille, une campagne inédite entre hospitaliers et libéraux pour éviter le renoncement aux soins

Lors d’une visioconférence, mardi 21 avril, l’AP-HM et l’URPS ML Provence-Alpes-Côte d’Azur ont alerté conjointement sur les risques liés au renoncement aux soins à travers une campagne de sensibilisation inédite.

 

“Confinés sauf pour votre santé !” Voici le message qu’ont souhaité faire passer l’AP-HM et l’URPS ML* Provence-Alpes-Côte d’Azur à travers leur campagne de sensibilisation. Ensemble, médecins hospitaliers et libéraux ont tenu à mettre en garde sur une éventuelle “deuxième crise sanitaire” qui pourrait arriver au vu du “retard de prise en charge énorme d’autres pathologies”, a indiqué le Pr Dominique Rossi, président de la commission médicale des hôpitaux publics de la cité phocéenne.

En effet, depuis le début du confinement, les salles d’attente des cabinets de ville se sont considérablement vidées, de l’ordre de 50% pour les généralistes, selon Laurent Saccomano, président de l’URPS ML Paca, de 70 à 80% pour les spécialistes. En parallèle, l’activité est pratiquement à l’arrêt chez les anesthésistes et les chirurgiens. En cause : les peurs des patients de déranger ou d’être contaminés, exacerbées par des messages parfois contradictoires de la part des autorités.

 

 

Risques de complications et de séquelles

Au-delà des pertes financières considérables pour les soignants, c’est avant tout pour la santé des patients que l’URPS ML et l’AP-HM ont tenu à mener une campagne de sensibilisation. “On a une nette diminution des consultations pour les douleurs thoraciques ou les symptômes liés à des accidents cardio-vasculaires​, constate Laurent Saccomano. On a aussi des inquiétudes vis-à-vis des maladies chroniques. On craint qu’il y ait une deuxième vague qui puisse arriver avec ce lot de patients présentant des décompensations ou des maladies aiguës prises en charge à un stade plus retardé […] pouvant entraîner des risques de complications et de séquelles.”

Laurent Saccomano note, par ailleurs, que le manque d’équipements, notamment de masques FFP2, a empêché parfois la bonne prise en charge des malades. “Certains professionnels, comme les infirmières, ont dû se mettre en retrait et ne pas aller au domicile de certains patients pour ne pas risquer de les infecter parce qu’ils prenaient en charge d’autres personnes infectées.”

 

 

 

À l’hôpital, des malades ont également disparu. Jean-Olivier Arnaud, directeur général de l’AP-HM note, par exemple, 110 à 120 passages par jour aux urgences de La Timone, à Marseille, contre quelque 250 avant la crise sanitaire. Le Pr Rossi constate notamment une baisse notable des dépistages du cancer du côlon, par exemple, même s’il note un certain frémissement récent. “Ce sont notamment les maladies silencieuses, les troubles cardiaques, les cancers, qui nous inquiètent”, précise de son côté Jean-Olivier Arnaud.

 

Ôter les barrières entre la ville et l’hôpital

Aujourd’hui, alors que les stratégies de déconfinement s’élaborent, les médecins hospitaliers et libéraux souhaitent rassurer les patients. “Après la phase de sidération, nous devrons apprendre à vivre avec ce Covid, au moins pendant les mois à venir, sans négliger les autres pathologies”, a déclaré Dominique Rossi. Des panneaux d’affichage, élaborés en concertation avec la ville, ont ainsi été mis en place dans les rues et dans le métro cette semaine pour sensiliser les Marseillais.

À l’hôpital, un circuit sera opérationnel pour les patients externes, “avec remise d’un masque, la mise à disposition de gel hydroalcoolique et, bien sûr, une distanciation sociale garantie”, précise le directeur général de l’AP-HM. En ville, depuis le début de l’épidémie, des filières spécifiques pour que les patients ne se croisent pas en salle d’attente et des délais ont été aménagés. En parallèle, environ 2.500 patients, qui ont suivi un traitement Covid à l’hôpital, font aujourd’hui partie de la file active dédiée au suivi des patients, mise en place depuis le début de la crise. “L’objectif est de travailler encore plus ensemble qu’auparavant dans l’intérêt des patients”, reprend Jean-Olivier Arnaud.

En “unissant leur voix”, les hospitaliers et les libéraux espèrent pouvoir éviter cette “seconde crise” et inciter les malades à consulter de nouveau, soit en présentiel ou au travers de la téléconsultation, car l’enjeu n’est pas non plus de “se ruer aux urgences”. “Ça fait longtemps qu’on parle de ce lien ville hôpital qui mérite d’être tissé, on s’est souvent fait l’écho de difficulté de transmissions d’informations. Aujourd’hui, certaines barrières sont en train de tomber, les outils ne sont pas tous opérationnels. Dans le suivi des patients Covid, plusieurs logiciels sont nés”, à l’image de TerCovid, note Laurent Saccomano. Ça mérite encore d’être développé, par exemple quand un patient ne nécessite plus une hospitalisation […], il faut que l’information soit délivrée presqu’en direct pour que les professionnels de santé libéraux assurent son suivi.”

 

 

Pour le Pr Rossi, cette communication commune est une véritable “révolution” dans l’organisation du système de santé. “Ce tremblement de terre qu’est le Covid nous a poussés à avancer sur des tas de choses qui feront qu’à l’avenir, je pense, la santé de nos concitoyens va être envisagée de manière différente et beaucoup plus pertinente.”

 

 

* Union régionale des professionnels de santé médecins libéraux.

 

À Paris, l’AP-HP aussi tire la sonnette d’alarme

Depuis le début de l’épidémie de COVID-19, l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a constaté une nette diminution du nombre de personnes admises dans les services d’urgence de ses hôpitaux pour des pathologies autres que le coronavirus, ainsi qu’une baisse “inquiétante” de fréquentation des services d’oncologie. Sur l’ensemble de l’AP-HP, depuis le début de l’épidémie, le nombre d’endoscopies a baissé de plus de 50%. Du 15 au 30 mars 2020, le nombre d’appendicites prises en charge par cœlioscopie a, par exemple, baissé de 35% par rapport à la même période en 2019. De même, au 14 avril, le nombre d’accidents cardio-vasculaires accueillis dans les services d’urgence est inférieur de 15% sur les sept derniers jours par rapport à la même période l’an dernier. Les urgences sont, elles aussi, désertées puisque les passages ont chuté de 45% pour les adultes et de 70% pour les enfants.
Inquiète pour la santé des malades, l’AP-HP assure que des mesures de précaution ont été mises en place dès l’accueil des patients. L’organisation de l’hôpital a ainsi été adaptée pour “accueillir les patients en toute sécurité”. Des recos sur “l’organisation du parcours des patients, de la protection des patients et des personnels hospitaliers à l’heure du confinement et de la reprise de l’activité non Covid-19” viennent d’être définies.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Louise Claereboudt

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