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Pour répondre aux soins non programmés, il faut une réorganisation collective de l’offre des médecins généralistes libéraux

Le Dr Luc Duquesnel, Président des Généralistes de la CSMF, approuve les constats posés par Thomas Mesnier, chargé par la Ministre de la Santé d’un rapport sur la prise en charge des soins non programmés. La ville doit donc s’organiser pour répondre aux demandes de soins de plus de patients, sans travailler plus, mais mieux, et dans un cadre collectif. Démonstration.

 

« Les médecins généralistes rejettent de façon catégorique, et avec raison, toute demande de travailler plus » relève Luc Duquesnel, Président des Généralistes-CSMF. Il ne faut surtout pas employer cette demande pour résumer le travail de Thomas Mesnier, l’urgentiste-député La République en marche, qui vient de remettre un travail sur la prise en charge des soins non programmés à Agnès Buzyn, après de longues consultations, dont celle de la CSMF. “Il faut une réponse collective et territoriale, car individuellement il est impossible de répondre à ces demandes de soins”, résume Luc Duquesnel.

Les constatations du jeune député sont partagées par les Généralistes de la CSMF : les urgences sont engorgées car l’utilisation du système de santé par les Français est “anormal” et c’est ainsi qu’on trouve aux urgences nombre de patients qui relèvent de la médecine ambulatoire.  Pourquoi ? Les causes sont multiples : le nombre de médecins généralistes est en décroissance, les patients sont gagnés par le consumérisme médical, l’accès facile à l’hôpital 24h sur 24, sans bourse délier, en tiers payant, permet à chacun de bénéficier d’un check up complet… “avec une accumulation d’actes pas forcément pertinents”, relève le Président, citant des scanners par exemple souvent réalisés larga manu.

Alors que la demande de prise en charge de la population induit une réponse mal adaptée, comment faire pour sortir de cette impasse ? Il faut s’or-ga-ni-ser. “La nature a horreur du vide”, se souvient Luc Duquesnel. Lorsque les médecins généralistes, dans certaines grandes villes, ont déserté la permanence des soins, SOS médecins s’était rapidement glissé dans le créneau laissé vacant, rappelle-t-il.

Aujourd’hui, outre les assurances complémentaires qui « offrent » des téléconsultations souvent gratuites, ce sont les établissements de soins, publics ou privés, qui se lancent dans une offre de soins de premier recours, en médecine générale et petite urgence. “Nous ne sommes pas dupes, la santé est devenue un marché concurrentiel”, commente le patron des Généralistes de la Conf’. “Ils parviennent ainsi à créer des filières pour alimenter leurs consultations spécialisées et remplir leurs lits”. Tout comme le font les urgences des hôpitaux.

Comment doivent alors s’organiser les médecins généralistes face à cette situation ? Ils réfléchissent à une réorganisation collective, basée sur l’expérience de la permanence de soins ambulatoire (PDSA) car, comme le résume Luc Duquesnel “nous ne partons pas de rien. Il y a 30 ans, les médecins se trouvaient seuls face à la demande de leur patientèle, 24h sur 24 et 365 jours par an. Depuis 2002, ils se sont collectivement organisés au travers d’associations départementales pour répondre aux demandes de soins aux heures de PDSA, c’est-à-dire aux heures de fermeture des cabinets, avec des financements dédiés. Et cela fonctionne globalement bien”.

Demain, la réponse doit être mieux organisée sur le territoire. “La demande de soins non programmés aux heures d’ouverture des cabinets doit être une réponse collective, partagée avec les autres médecins du territoire”, affirme le Président des Généralistes-CSMF. Il fait remarquer que certaines Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) se créent, en mettant en priorité N° 1, la réponse aux soins non programmés. “Les réponses ne seront pas les mêmes selon les territoires car les problématiques, notamment démographiques, sont différentes” fait-il valoir. “Il ne faut donc pas dire aux médecins généralistes jeunes ou vieux de travailler plus, mais de travailler autrement”, rappelle-t-il.

Travailler autrement, en s’aidant d’une boîte à outils qui permettra d’adapter au territoire, l’organisation qui lui correspond le mieux en fonction de ses particularités. Ici, toute une catégorie de patients pourra être prise en charge par d’autres professionnels de santé ; ailleurs, la téléconsultation avec une infirmière aux côtés du patient fera très bien l’affaire. C’est ainsi que, dans certains départements pour la PDSA, 15 % des appels font l’objet d’une ordonnance faxée par le médecin régulateur libéral. Certains patients pourront faire l’objet d’un protocole de suivi pluri professionnel pour libérer du temps médical, sans oublier le numéro d’appel unique 116 117. D’autres médecins envisagent de créer des unités de soins non programmés au sein de leur MSP avec une secrétaire et une infirmière pour aider le médecin généraliste à prendre en charge les patients. “Une secrétaire répond et déclenche la réponse la mieux adaptée en fonction des territoires, éventuellement dans un cadre de lien ville-hôpital. Voilà le concept de la boîte à outils”, résume le Dr Duquesnel.

Les économies générées grâce à un moindre recours aux urgences devront permettre de financer ces nouvelles organisations professionnelles, imagine-t-il. “Il y a toute une organisation à mettre en place car il ne peut plus y avoir de réponse individuelle. Or, pour les réponses collectives, les médecins généralistes ont déjà montré qu’ils avaient un certain savoir-faire”, sourit-il.