Pas de trêve des confiseurs pour la maîtrise des dépenses. Le secteur de l’imagerie ayant été jugé trop dynamique par l’Assurance maladie en fin d’année, les radiologues viennent de subir une baisse unilatérale de leurs tarifs. Président de la Fédération national des médecins radiologues (FNMR), le Dr Jean-François Masson commente cet événement, alors que la profession était en négociation depuis 18 mois afin d’élaborer un nouvel accord triennal.
Egora.fr : Vous attendiez-vous à la baisse unilatérale des tarifs de radiologie, vendredi 27 janvier au soir ?
Dr Jean-Philippe Masson : On s’y attendait sans s’y attendre… A partir du moment où l’article 99 de la loi de financement de la sécurité sociale 2017 a été adopté, on savait qu’il y aurait des répercussions sur les forfaits techniques, puisque cet article donne tout pouvoir au directeur de l’UNCAM (représentant les trois caisses nationales. Ndlr) pour procéder à des baisses arbitraires sans aucune concertation. Mais c’est tombé très rapidement. La baisse des forfaits techniques, mais aussi la baisse du Z qui disparaît en tant que tel, et est mis au même niveau que les suppléments qui existent déjà pour les rhumatologues et les pneumologues. En fait la différence de montant entre ces deux suppléments, c’est ce qui permettait l’investissement puisque le matériel des radiologues est plus sophistiqué et onéreux que celui utilisé par les rhumatologues et les pneumologues.
En réalité, les deux mesures tapent sur les capacités d’investissement des radiologues, ce qui revient à dire qu’on va nous empêcher de bénéficier de toute l’innovation qui existe dans notre spécialité, et Dieu sait s’il y en a. Quand Marisol Touraine et François Hollande vont ensemble à Poitiers pour déclarer que la France est une terre d’innovation pour la médecine, c’est faux, c’est fini. Ce n’est pas la première fois qu’on nous baisse les tarifs et, lorsqu’on les rencontre, les inductriels de l’imagerie nous disent qu le France est pour eux un marché émergent.
Combien y a-t-il eu de baisses brutales dans les années récentes ?
Il y en a eu moins dans les années récentes qu’auparavant, car des plans d’économies triennaux ont été négociés entre la FNMR et la caisse d’assurance maladie. Nous étions lancés depuis 18 mois dans une discussion avec la CNAM pour la mise en place d’un nouveau plan triennal, mais la caisse a une curieuse conception de la négociation, c’est-à-dire qu’elle fait des propositions, sans concevoir que la partie adverse puisse en faire également. Or, le montant demandé cette année par la caisse, 80 millions, était encore supérieur aux montants réalisés précédemment, alors qu’on partait déjà d’une économie globale de 900 millions… Nous, nous proposions un plan axé sur la maîtrise médicalisée, la pertinence de nos examens, pour que les patient puisse bénéficier des meilleurs soins. La caisse a refusé, ou plutôt, elle voulait rajouter notre plan au sien, en prétextant qu’elle voulait 80 millions d’ici la fin de l’année 2016, alors qu’elle n’était pas certaine de l’efficacité, de notre plan.
Or, la radiologie de pouvait pas assumer 80 millions d’économies et dans le communiqué qu’elle a diffusé aux médias, la caisse fait preuve de malhonnêteté quand elle dit que cette baisse ne représente que 1,2% sur les 4 milliards de l’imagerie médicale, car dans ces 4 milliards, il y a 1 milliard consacré à l’échographie, qui progresse de 5 % par an. Mais là, on n’y touche pas. La baisse du supplément Z représente une baisse réelle de 6% pour notre spécialité. Il était à 21, 8% et on tombe à 15,8%. Il y eu manipulation de la Caisse pour présenter les choses de manière trompeuse.
Il n’y aura pas de passage devant la commission de la nomenclature ?
L’article 99 doit créer une nouvelle commission d’ici la fin de l’année, mais par dérogation, pour l’année 2017, le directeur de la Cnam peut agir comme il l’entend sans réunir la commission, qui de toutes manières, n’émet qu’un avis consultatif. Je n’appelle pas vraiment cela de la démocratie. C’est le 49-3 de la radiologie.
Que comptez-vous faire maintenant ?
Nous avons publié un communiqué, nous allons interroger nos conseils juridiques pour savoir si nous pouvons attaquer la décision de la caisse, car cet article 99 permet à la caisse d’agir toute seule sans concertation et cela nous laisse songeur… Notre conseil d’administration s’est réuni en urgence le week-end suivant la décision de baisse. Les administrateurs ont fait plusieurs propositions, qui peuvent aller des fermetures tournantes à l’arrêt de la permanence des soins. On verra, mais je peux affirmer que les radiologues sont absolument exaspérés.
Source :
www.egora.fr
Auteur : F. Na