On dit de lui qu’il est l’un des plus grands tueurs en série de l’Histoire. En 2000, le Dr Harold Shipman, généraliste dans une banlieue tranquille près de Manchester, a été condamné à la prison à vie pour avoir tué pas moins de 15 patientes. Selon les enquêteurs, il serait impliqué dans plus de 200 meurtres au total, commis en un peu plus de 20 ans, par injection de diamorphine. Et cela sans aucun mobile.

 

Qui aurait pu se douter que ce gentil médecin de famille, si dévoué, marié père de quatre enfants, était en réalité un tueur sanguinaire ? Harold Shipman était généraliste à Hyde, une petite commune près de Manchester. Il suivait pas moins de 3 000 patients, visiblement satisfaits.

Son mode opératoire était toujours le même. Il se rendait en visite, le plus souvent chez une dame seule, procédait à la consultation puis lui injectait, par piqûre, une importante dose de diamorphine. Une fois que la patiente avait poussé le dernier soupir, il rédigeait le certificat de décès, notait quelques faux antécédents graves dans le dossier médical, et prévenait la famille, en prenant soin de leur souhaiter ses plus sincères condoléances.

 

Une terrible erreur

Un “rituel” que le médecin aurait répété quelque centaines de fois entre 1975 et 1998. Sans jamais avoir été inquiété. Des familles ont tenté de faire part de leurs soupçons, mais ils ont été vite balayés tant ils semblaient absurdes. Une femme médecin d’un cabinet voisin a, elle aussi, alerté les autorités du nombre étonnement élevé de décès parmi les patients de son confrère. Un signalement qui est, là encore, resté sans suite.

C’est en fait une terrible erreur qui a mis fin aux macabres plans du docteur Shipman. Le 24 juin 1998, le médecin de famille se rend chez une de ses patientes, Kathleen Grundy, 81 ans, ancienne maire de la commune de Hyde. Il accepte de partager avec elle une tasse de thé, l’examine, puis lui fait son habituelle injection mortelle… Comme toujours, il trafique le certificat médical, pour que la mort paraisse bien naturelle. Mais quelques jours plus tard, la fille de madame Grundy apprend que sa mère a légué toute sa fortune à son médecin, pour le remercier “de tous les services qu’il a rendu à la commune de Hyde”. Trop louche pour être honnête… Les enquêteurs sont prévenus et après une rapide enquête s’aperçoivent que le document est un faux, et qu’il a été rédigé sur la machine à écrire du cabinet du docteur Shipman. Pourquoi le médecin qui semblait au-dessus de tous soupçons a-t-il pris un risque aussi énorme ? C’est un des grands mystères de cette affaire.

 

Les lettres de soutiens affluent

Cette erreur, marquera le début de sa chute. En août 1998, le corps de Kathleen Grundy est exhumé puis autopsié. Le médecin est arrêté. C’est alors que les langues se délient. En quelques semaines des dizaines de familles font part de leurs soupçons quant à la mort d’un proche. Shipman nie tout, et il est fortement soutenu par une grande partie de sa patientèle qui se refuse à croire que leur si dévoué docteur est en réalité un meurtrier ; les lettres de soutiens affluent.

Mais l’enquête qui suit son cours est accablante pour Harold Shipman. Onze corps sont exhumés et leur autopsie confirmera qu’ils sont morts par overdose de diamorphine. La personnalité du médecin tueur commence à se dévoiler. On apprend qu’avant de s’installer à Hyde, Harold Shipman avait été suspendu pour s’être procuré de fortes doses d’opiacés en trafiquant des ordonnances. Il a d’ailleurs suivi un long traitement psychiatrique pour toxicomanie.

Selon un rapport de 2002, il aurait commis son premier crime en 1975. Il a attendu plus de trois ans pour récidiver, en 1978, avec quatre injections mortelles cette année-là, puis 6 meurtres (seulement) jusqu’en 1983. C’est après que le rythme s’accélère avec 28 morts en 1995, 30 en 1996 et 37 en 1997. En juin 1998, à son arrestation, il avait déjà tué 18 autres personnes. Au total 355 décès suspects sont examinés par les enquêteurs.

 

“Je suis un être supérieur”

En 2000, c’est finalement pour 15 homicides, qu’il est condamné à 15 peines de prison à perpétuité. Lors de son procès, il nie toujours les faits, ne montre aucun remord, explique que Mme Grundy était toxicomane… Pour les juges, l’homme est un mystère. Les experts qui se succèdent sur ce cas, le décrivent comme un “manipulateur”, “sûr de lui et de son impunité”. Il aurait lâché à l’un d’eux un laconique “je suis un être supérieur”. Pour John Pollard, qui a dirigé l’enquête sur ses meurtres, il n’y a qu’une seule explication logique à la folie meurtrière d’Harold Shipman : “Il aimait tout simplement voir quelqu’un mourir et appréciait ce contrôle sur la vie et la mort.” Janet Smith, une magistrate qui a suivi le dossier parle quant à elle d’un homme “drogué au crime”.

Le 31 janvier 2000, le bon docteur Shipman apprend donc qu’il finira ses jours en prison. Son épouse, Primrose, le soutient toujours, certaine de son innocence. Elle lui rend régulièrement visite en prison. Le 14 janvier 2004, il est retrouvé mort, pendu dans sa cellule. Aujourd’hui encore, personne ne peut dire avec certitude combien de patients ont été tué par le docteur Shipman.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : A.B.

 

[Avec Lexpress.fr, Nouvelobs.com, Liberation.fr et Lalibre.be]