Lundi prochain, la Commission paritaire de l’OGDPC doit analyser les prévisions de dépenses des médecins et, si ces dernières sont trop dynamiques, prendre des mesures pour les réduire. Dans les tuyaux : la diminution par deux de l’enveloppe allouée aux médecins pour les formations non présentielles.

 

Encore un soubresaut pour le financement du développement professionnel continu (DPC), qui n’en est décidément pas avare depuis sa mise en place, par la loi Hôpital, patients, santé et territoires… Lundi prochain, le 15 juin, la commission paritaire de l’OGDPC (organismes gestionnaire du DPC) se réunira pour concrétiser la résolution votée en mai dernier par la section médecin et analyser des chiffres et des courbes.

 

275 € au lieu de 550

Cette section, où siègent paritairement l’Etat et les Caisses d’un côté et les médecins libéraux de l’autre, fera le point sur le montant estimé des inscriptions des médecins à la mi-année. Si ce montant réalisé est supérieur ou égal à 60 millions d’euros à cette date, les médecins pourraient ne plus bénéficier que de la moitié de l’enveloppe allouée aux formations non présentielles, soit 275 au lieu de 550 euros. La mission de la commission paritaire est en effet de déterminer le niveau des forfaits de prise en charge des formations pour chaque profession. Cet épisode souligne une fois de plus la très forte contrainte financière qui pèse sur le financement de la formation continue obligatoire depuis sa mise en place. Car cette nouvelle crise était presque fatale : la dotation 2015 pour les médecins, d’un montant de 85 millions d’euros est en baisse de 15 millions par rapport à la dotation 2014, qui avait été tout juste suffisante après une sérieuse alerte à l’automne.

En effet l’année dernière, les warnings avaient retenti avant les vacances d’été, et des mesures de sauvegardes avaient été prises en urgence en septembre pour éviter la banqueroute et un trou de 30 millions d’euros si les dépenses avaient continuer à filer comme au début de l’année. A partir du 17 octobre 2014, seuls les médecins qui ne s’étaient pas encore inscrits à un programme de DPC pouvaient y prétendre, 10 millions de l’assurance maladie ont été injectés dans les caisses, 3 millions d’économies sur les frais de gestion ont été opérés et une concertation s’est mise en place entre l’Etat et l’OGDPC pour pérenniser l’avenir. Mais on avait un peu trop vite crié au loup car, une fois effectué le bilan des dépenses réalisées, le robinet a été ré-ouvert le 1er avril dernier, avec possibilité redonnée aux médecins de souscrire à plusieurs séminaires.

“L’unique bilan qui compte, c’est celui de l’état réel des dépenses. L’an passé, on s’était basé sur les déclarations d’engagement des médecins et il y a eu un reliquat”, commente le Dr Jean-Louis Bensoussan, représentant de MG France et membre du bureau du conseil de surveillance de l’OGDPC (ce conseil a la mission de surveiller la mise en œuvre du DPC, contrôler l’utilisation des sommes allouées, faire un bilan et suggérer des pistes d’amélioration pour le ministère de la Santé). “L’enveloppe est insuffisante, si on veut mettre en place le DPC pour les médecins généralistes, il faut beaucoup plus d’argent.”

 

“Il n’est pas question de revenir à un seul programme par généraliste”

La commission paritaire avait fait une autre proposition, relate-t-il, moduler le forfait pédagogique alloué aux organismes en jouant sur la part fixe et variable de cette dotation, pour prendre en compte la durée de la formation. “Mais il est absolument clair pour MG France, qu’il n’est pas question de revenir à un seul programme par généraliste”, assène-t-il, en rappelant que la future loi de santé veut transformer l’obligation annuelle de DPC en une obligation triennale.

Depuis l’an dernier déjà, le gouvernement avait commencé à prendre les devants pour adapter ses obligations à la situation financière de l’OGDPC. Un arrêté autorise ce dernier, non plus à financer systématiquement le DPC des professionnels de santé, mais simplement “à y concourir”. De plus, l’organisme gestionnaire a désormais l’obligation de prendre des mesures de retour à l’équilibre dès qu’apparaît un dérapage de 2 % du budget.

En apprenant l’intention de la commission paritaire de rogner le forfait de la formation non présentielle, qui représente la moitié de formations dispensées en 2014, la CSMF est immédiatement montée au front. En rappelant les préconisations de la Haute autorité de santé (HAS) sur le e-learning, qu’elle promeut ; les remarques de l’IGAS, qui avait brocardé l’absence de contrôle “sur la qualité et la crédibilité de certaines prestations offertes en formation non présentielle”. Et en exigeant que “toutes les simulations soient présentées à la commission paritaire pour qu’elle puisse prendre des décisions véritablement éclairées”. Car pour la centrale “l’équité serait de faire porter une partie de l’effort sur tous les programmes et quel que soit le temps passé. L’économie serait bien supérieure et probablement suffisante à l’équilibre des comptes”.

 

“Plus de sous, plus de formation”

“L’idée de diminuer par deux le montant de la dotation médecins pour la formation non présentielle ne sera pas forcément retenue en commission paritaire”, avance le Dr Gérald Galliot, le président du Conseil de surveillance du DPC. Il critique également l’idée de limiter la dotation aux organismes “ce qui pourrait les mettre en grande difficulté”. Mais il n’est pas optimiste pour autant. “On veut former plus de médecins avec un budget en diminution. Il se peut que la décision soit de former les médecins pour 85 millions d’euros. Et d’arrêter en octobre par exemple, s’il n’y a plus d’argent.”

Membre de la CSMF, Gérald Galliot remarque que l’on pourrait se poser la question de “réalimenter” la dotation des médecins, eux qui ont déjà perdu le montant de la dotation pour la formation conventionnelle… “On attend les chiffres, mais je crains que l’attitude soit définitivement ferme. On consomme l’enveloppe. Plus de sous, plus de formation.”

Il reste toutefois l’espoir que le montant de 60 millions ne soit pas atteint au 15 juin. Mais le problème de financement ne sera pas résolu pour autant. Une fois promulguée la loi de santé, ré-intitulée loi de modernisation du système de santé, il faudra donc attendre ses décrets d’application qui permettront d’entrevoir la réforme du DPC annoncée par le gouvernement.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne