Un rapport d’expertise collective de l’Agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail (Anses) concernant les édulcorants intenses conclue à l’absence d’intérêt nutritionnel notamment sur la perte de poids et chez les patients diabétique.

 

Couramment utilisés en particulier dans les régimes hypocaloriques ou hypoglucidiques, les édulcorants intenses (EI) n’apportent aucun bénéfice sur le contrôle du poids, la glycémie chez les sujets diabétiques ou l’incidence du diabète de type 2. C’est ce qui ressort de l’expertise collective menée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail (Anses), et dont les résultats ont été rendus publics le 9 janvier 2014, assortis d’un avis d’experts. L’appellation “édulcorants intenses” désigne “différents additifs au pouvoir sucrant très élevé sans apport calorique”, rappelle l’Anses. Les plus utilisés en France sont l’aspartame, l’acésulfame K et le sucralose.

En plus d’étudier les risques qui leur sont associés et qui ont été évoqués dans plusieurs études récentes, le rapport analyse, pour la première fois leur intérêt sur le plan nutritionnel.

Les experts affirment ainsi que si l’utilisation des EI en substitution des sucres entraine un moindre apport énergétique, les données sont insuffisantes pour garantir le maintien de cet effet à moyen ou long terme. De même, la sensation de réduction de la faim apporté par les EI avant un repas se dissipe très rapidement, et même avant le repas. selon le rapport, l’impact des EI sur la perte de poids n’est pas mis en évidence dans les études qui apparaissent contradictoires sur ce sujet chez l’adulte. Chez l’enfant, les résultats sont plus tranchés montrant la nocivité des EI dans cette population. La majorité des études observationnelles prospectives réalisées chez l’enfant montre, en effet, que l’utilisation d’EI est paradoxalement associée à un gain de poids, sans que la causalité de cette association n’ait été établie.

 

Pas d’impact sur le métabolisme glucidique et lipidique

Les experts concluent à une absence d’impact des EI sur l’homéostasie glucidique. Les études montrent ainsi que la consommation d’EI n’a pas d’effet sur les paramètres glycémiques (glycémie, insulinémie) à court, mais aussi à moyen terme chez le sujet sain ou chez le sujet diabétique. Les EI n’apporteraient pas de bénéfice concernant la prévention du diabète, mais ils ne favoriseraient pas non plus l’apparition de la maladie, comme cela a été suggéré récemment (Suez J et al. Nature. 17 septembre 2014). Et les études épidémiologiques à long terme sur le risque d’apparition d’un DT2 présentent des résultats hétérogènes. Cependant “les études les plus robustes ne rapportent pas d’effet”, précise le rapport de l’Anses.

Par ailleurs, si deux études ont rapporté que la substitution des sucres par l’aspartame diminuait la concentration plasmatique des triglycérides, “les données sont trop limitées pour conclure à un bénéfice des EI sur le profil lipidique”, affirme le rapport.

 

Des risques non prouvés mais à surveiller

Les experts ont étudié l’impact des EI sur l’habituation au gout sucré. Dans ce domaine, le rapport estime que la consommation d’EI n’a pas montré d’effet chez l’adulte. “Toutefois, chez l’enfant il n’y a pas de données permettant de statuer sur un effet éventuel des EI sur le développement du goût, des préférences alimentaires et sur le contrôle de la prise alimentaire”, ajoutent les experts.

Concernant les risques associés aux EI, et qui ont été évoqués à plusieurs reprises, les résultats de l’expertise sont plutôt rassurants, même si les données semblent, là encore, insuffisantes. Ainsi, concernant la femme enceinte, il n’est pas possible, pour les experts, d’identifier de bénéfice ni de conclure sur le risque lié à la consommation des édulcorants intenses pendant la grossesse, que ce soit sur la santé de la mère, les paramètres obstétricaux, ou la santé du nouveau-né. De même, les études épidémiologiques n’ont, globalement, pas mis en évidence d’effet de de la consommation d’EI sur le risque de cancer. “Seule une étude récente [Schernhammer ES et al. Am J Clin Nutr. 2012] suggère un lien entre la consommation de boissons contenant des EI et l’apparition de lymphomes non hodgkiniens et de myélomes, appelant des travaux complémentaires”, précise l’Anses. Les auteurs insistent : “en raison du nombre limité d’études, il n’est pas possible d’écarter des risques potentiels à long terme liés à la consommation d’EI dans des populations spécifiques, notamment les consommateurs adultes quotidiens et les enfants”.

En conclusion, l’Anses souligne “le déficit de données pertinentes sur les bénéfices potentiels de la consommation d’édulcorants, dans le contexte d’une utilisation pourtant large et ancienne de ceux-ci dans le cadre alimentaire” ainsi que la nécessité de mener de nouveaux travaux de recherche. Elle estime par ailleurs “qu’il n’existe pas d’élément probant permettant d’encourager, dans le cadre d’une politique de santé publique, la substitution des sucres par des édulcorants intenses”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Dr Marielle Ammouche

 

[D’après Évaluation des bénéfices et des risques nutritionnels des édulcorants intenses. Avis de l’Anses. Rapport d’expertise collective. Novembre 2014]