On peut désormais y croire vraiment : le DPC (développement personnel continu) a enfin pris son envol. L’indemnisation est débloquée, après les couacs ayant émaillé l’entrée en scène, au 1er janvier dernier, de cette cathédrale administrative dédiée à la formation continue de tous les professionnels de santé libéraux et salariés (hormis l’hôpital public).

 

La preuve : les 4 299 médecins qui ont réalisé un premier programme de formation continue entre le 1er janvier et le 30 juin, sont en cours d’indemnisation, l’obligation de remplir un questionnaire en ligne ayant été levée pour eux durant cette période probatoire. Il était temps. Voilà des mois que ces confrères attendaient leur virement et çà ruait sacrément dans les brancards. C’est par l’intermédiaire de MG Form, la structure de formation de MG France, qui a fortement tapé du poing sur la table, que toute cette grogne est remontée cet été jusqu’au ministère de la Santé. Lequel a donné à l’organisme de gestion du DPC, l’OGDPC, l’instruction publique lui permettant de débloquer les fonds. D’ailleurs, une enveloppe a été dégagée pour financer une formation en interprofessionnel, et une autre destinée à la formation des formateurs.

 

“Ce système a été mis en place avant d’être opérationnel, c’est usant.”

“Tout semble lié au système informatique”, explique le Dr. Jean-Claude Soulary, le président de MG Form. Un système “énorme”, tentaculaire, qui a été lancé au 1er janvier sans phase de test, dénonce-t-il. Les médecins se sont retrouvés en position de beta-testeurs. Dès qu’il y avait un bug, les informaticiens s’activaient pour le régler. Mais c’est à chaque fois un rapport de force. Ce système a été mis en place avant d’être opérationnel, c’est usant”.

Et les médecins sont parfois à la traîne. “Nous rencontrons plus de confrères qui se plaignent de ne pouvoir accéder au formulaire d’évaluation en ligne que de médecins qui se réjouissent d’avoir reçu leur indemnisation” confirme le Dr Laurent Saccomano, président de l’AFML, la structure ad hoc du SML. Mais il ne veut pas polémiquer… “Il faut une coordination entre les associations de FMC historique, elle créera un effet d’entraînement. Il est inutile de jouer la division, tout le monde est dans le même bateau”, estime-t-il. Mais il peste quand même sur le retard lié à la mise en place du nouveau système informatique alors que “l’existant était satisfaisant. Progressivement, on revient à ce qui marchait précédemment du temps du CPN FPC. Quel gâchis !”.

L’obligation de DPC et son indemnisation a-t-elle drainé de nouveaux médecins vers la formation continue ? A l’OGDPC, on estime à près d’un médecin sur deux (45 %), la proportion de nouveaux venus. D’après les comptes de l’AFML, cela ne concernerait qu’un sur quatre. Pas de quoi pavoiser. “La montée en charge n’est pas spectaculaire, reconnaît le Dr Saccomano. Etant donné le semestre de retard administratif pris par le dispositif, nous sommes un peu inquiets. Nous serons peut être obligés de supprimer des stages au deuxième semestre.”

 

Premiers arrivés, premiers servis

Dans le précédent système, les médecins pouvaient prétendre conventionnellement à 8 journées d’indemnisation. Désormais, avec une enveloppe de 83 millions pour indemniser tous les médecins libéraux, les salariés des centres de santé, et les opérateurs de DPC, ce sera bien moins, au maximum quatre journées. Cela représentera deux formations par médecin au lieu de quatre.

Une demi-journée en formation présentielle est indemnisée 172,50 euros avec un maximum de 3,5 jours pour un programme, soit 1 207 euros. Par internet, l’indemnisation forfaitaire est de 517,50 euros.

On s’en doute, les premiers arrivants seront les premiers servis. “Avec le risque que les premiers arrivants soient les vétérans de la FMC, ceux qui en ont le moins besoin” regrette le président de l’AFML. Pour les nouveaux arrivants, il est vrai qu’on peu trouver rebutant de devoir ouvrir un compte en ligne sur mondpc.fr , remplir des questionnaires, envoyer un RIB…

Formalités que l’on assume souvent à la place des praticiens au Collège des Hautes études en médecine, en Bretagne. Deux secrétaires ont été embauchées pour assurer le coaching des nouveaux venus, un peu perdus dans le dédale de questions pratiques. CHEM où l’on brasse du monde : 3 200 inscriptions de professionnels de santé aux séminaires présentiels, 2 000 pour le e-learning, uniquement au premier semestre. “Nous sommes sereins, nous ne faisons pas partie des gens qui critiquent” dit-on dans l’entourage de la direction du Collège, en reconnaissant toutefois que le dispositif n’est pas encore en phase de “routine”. Les responsables de l’OGDPC “font ce qu’ils peuvent avec un budget contraint et des effectifs limités. Nous ne nous inscrivons dans aucun jeu politique ou syndical”, y insiste-t-on.

 

“Que de temps perdu, que de temps gâché”

Reste, la situation des organismes où l’on a souvent dû embaucher pour assumer la charge administrative et pédagogique liée au DPC. Ainsi 896 ODPC sur 1 999 sont enregistrés par l’OGDPC, dont 36 en Bretagne (sur 76) et nombre d’entre eux se trouvaient, au printemps, dans une situation budgétaire intenable, usant leurs fonds propres, empruntant, sans le moindre sou entrant en caisse. Là encore, la situation s’est détendue et, pour ceux qui en ont fait la demande (encore fallait-il le savoir), une avance de trésorerie de 30 % du montant des sommes engagées leur a été virée cet été.

“Mais il s’agissait d’un virement brutal, à la hussarde, sans tableau, sans indication comptable, critique le Dr Soulary. Cela a représenté un triple travail pour les secrétaires de MG Form d’essayer de comprendre à quoi ces sommes correspondaient. Toujours cette informatique”. “On va y arriver, mais que de temps perdu, que de temps gâché”, peste le Dr Saccomano.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne