La diffusion de l’appel de Naomi Musenga au Samu, quelques semaines après le décès de la jeune fille de 22 ans a provoqué un vif émoi dans la société mais aussi dans la communauté des soignants. Médecins, vous avez tenu à expliquer l’envers du décor, à apporter des nuances dans les critiques qui n’ont pas manqué de pleuvoir sur l’organisation des urgences et sur la régulatrice qui a pris l’appel.

 

LES FAITS

Le 29 décembre, Naomi Musenga est seule à son domicile quand elle est prise de violentes douleurs au ventre et compose un numéro d’urgence. D’abord transférée vers le centre d’appels des pompiers puis vers celui du Samu, elle se plaint de violentes douleurs d’une voix faible : “J’ai mal au ventre”, “J’ai mal partout”, “Je vais mourir…”, dit-elle en soupirant. “Vous allez mourir, certainement un jour comme tout le monde”, lui répond l’opératrice, qui la renvoie vers SOS Médecins.

Après plusieurs heures, Naomi Musenga parvient à joindre les urgences médicales, un appel qui déclenche cette fois l’intervention du Samu. Emmenée à l’hôpital, elle est victime d’un infarctus puis transférée en réanimation avant de décéder à 17h30.

Le décès de Naomi Musenga “a permis de révéler des dysfonctionnements (…) Aujourd’hui, j’ai connaissance d’une dizaine d’affaires” comparables, “mais je pense que c’est sous-estimé encore”, a indiqué Agnès Buzyn ces derniers jours. “Aujourd’hui me remontent des agences régionales de santé des signalements beaucoup plus fréquents qu’avant. Il y a eu une prise de conscience, je pense, dans les services des Samu de la nécessité de faire remonter les dysfonctionnements, ce qui n’était pas le cas avant”, a-t-elle souligné.

La violence qui s’est abattue sur la régulatrice, les soignants et le SAMU est stupéfiante. Trois ARM salariées des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, accusées nommément sur Twitter, ont subi un déchainement de violence alors qu’elles n’ont rien à voir avec le drame.

“J’aime les gens, et si je suis urgentiste c’est pour aider les personnes qui en ont le plus besoin, qui sont vraiment malades. Mais la régulation, c’est la seule partie de mon travail que je déteste, qui me fait haïr les gens, qui me donne envie de les houspiller, de les insulter, de les mépriser, qui me rend suspicieux du mensonge des gens à chaque appel… Et je finis misanthrope pendant 24h après une garde au centre 15”, a témoigné un médecin urgentiste, apportant des nuances indispensables à l’explication de la situation.

 

VOS RÉACTIONS

“Le SAMU nous prenait de haut si nous assumions les urgences”

Par michel_D l

Quand la couverture est trop petite elle ne peut couvrir à la fois les pieds et les épaules…

Je fais partie des médecins dinosaures qui répondaient au téléphone même en pleine nuit, 24h/24 pour toute ma patientèle. Mes collègues étaient assez nombreux et faisaient de même. De plus j’étais médecin des pompiers donc ils me transmettaient les appels difficiles, et j’y allais comme un seul homme. J’ai vu la couverture médicale rétrécir sur 30 ans. Le SAMU nous prenait de haut si nous assumions les urgences alors les collègues l’ont fait de moins en moins. Les médecins libéraux ont déserté progressivement.

Je me disais : un jour le SAMU ne pourra plus tout digérer. NOUS Y SOMMES … Hasard de la chronologie : j’ai quitté le navire (retraite) quand le Titanic a heurté l’iceberg. Comme ce navire le système de santé français (le meilleur du monde, c’est bien connu) coule inexorablement, avec la bénédiction des ministres et du conseil de l’ordre qui avait toutes les statistiques pour prévoir le naufrage, et qui n’a RIEN fait.

Une statistique des âges des médecins (installés) en forme de pyramide à l’envers, un jeune de terminale est capable de comprendre que ça ne va pas l’faire comme ils disent.

[Commentaire publié en réaction à l’article Intervention tardive du Samu : enquête ouverte après la mort d’un septuagénaire]

 

“Ce qu’on ne peut pas dire… sans être traité de raciste”

Par donbonetti

Cher confrère urgentiste votre témoignage devrait être lu aux actualités télévisées midi et soir pendant trois jours : ce serait bien peu encore au regard de cette pantomime journaleuse qu’on écoute sur f-info ou regarde sur Bfm, consistant à ne rien dire sur le Tchétchène, le plan visuel de la rue, le lieu où il y avait un scooter.  Le restaurateur étonné.  Le gentil voisin de l’assassiné.

Ce serait bien peu, cette lecture du réel, … mais ô combien justifié de sortir la bienpensance et de ses incantations ! … et les cons de leur sirop victimaire, de leurs indignations hypnotiques et des émois de la société Koh Lanta.

Enfin une remontée de la vraie vie

Au lieu de témoignages comme le vôtre (impossibles en effet à émettre hors anonymat, tant le formatage de la bienpensance fait censure du réel) on a eu droit aux interviews de Pelloux ( “Pelloux, le retour “) aux admonestations de la Ministre (plus démago tu meurs quand on sait le naufrage de la Santé bureaucratisée), laquelle vient d’accoucher (vieux tic bureaucratique pour utiliser les évènements en masquant l’accentuation du pire ) d’une promesse de mesures sur la “qualité ” accrue et les “protocoles  uniformisées” … On est rassuré !!! …

Et les cons vont adorer ça.

Et Jupiter a l’illusion de réformer

Et nous manque l’annonce des psychologues pour panser nos plaies hémorroïdaires à chaque fois que le totalitarisme nous les dilate chaque jour un peu plus.

Et les cons qui prolifèrent dans la société avachie de se sentir un peu plus confortés, un peu plus   impunis à mentir et consommer au nom du Bien, du ” vivre ensemble”,  de l’écologie qui leur fait battre des records d’achat de bagnoles (mais propres et désormais à essence) pour se rendre “librement” dans ces concentrations urbaines où l’on peut tant se distraire dès que l’ on quitte ses mètres carré en moins, payés sur trente ans, et son ordinateur diabétogène pour aller courir dans la rue pour les plus branchés.

Tout cela est littéralement à vomir : c’est la gabegie structurelle, pusillanime, d’une société de poulets en batterie.

Bon, je sais … je m’énerve au-delà de l’utile tellement j’ai parfois la nausée.

Entre les news sur Strasbourg et les “compte-rendu” sur l’attentat je n’avais eu qu’un seul moment de sourire : l’interview de notre cacochyme responsable de l’Intérieur.

C’est dire comme je vous remercie de votre témoignage !!! … mille fois merci.

L’avocat de la régulatrice détruite par son “métier” dont vous illustrez le quotidien s’appelle Olivier Grimaldi. J’ai essayé de trouver son adresse après avoir vu son interview avant – hier : pas réussi à la trouver par l’annuaire du barreau.

Je voulais lui dire la même chose que vous dans l’esprit et l’aider ainsi.

Je voulais aussi ajouter quelque chose que personne n’a encore osé dire : quand on entend la bande son (la première fois je suis tombé dessus sans connaître le nom de la victime), on perçoit un léger accent.

Je me suis dit aussitôt : c’est une africaine… et la suite me l’a confirmé

Or, l’expression vocale et corporelle de de douleur ou de la maladie grave a des variations ethniques et culturelles qui vont bien au-delà de la maîtrise langagière : elles sont de l’ordre d’un immémorial vécu culturel.

Les anamnèses en médecine sur des cas graves (infections, cancers évolués) ou en consultation de la douleur permettent toute une typologie de l’expression souffrante, très différente entre les gens issus d’Afrique noire, de la Méditerranée ou d’Asie.

Ce que personne n’osera dire dans cette société désormais submergée par le mensonge pavlovien de la bienpensance obligatoire, c’est que la permanencière du 18 ou du 15 aura reconnu ce que vous appelez un con dans votre témoignage, c’est à dire un pervers qui s’amuse, une hystérique qui joue, une dépressive bourrée qui sort de cuite etc…

Elle n’aura pas identifié ce que j’ai tout de suite entendu en écoutant la bande son : “Merde, ça c’est une black, et c’est grave !”

Le problème c’est que même ça on ne peut sans doute pas oser le dire… sans être traité de raciste alors que la famille de Naomi est admirable dans son expression.

[Commentaire publié en réaction à l’article “La régulation me fait haïr les gens” : le coup de gueule d’un urgentiste]

 

“Débordée de trop d’appels “bidon”…”

Par black sheep

Pour avoir été confronté physiquement aux “appels bidon”, je ne peux que souscrire aux propos du régulateur : reçu à coup de poings, personne au domicile, menacé d’une arme, etc … mais aussi appelé pour un “OAP” (et là faut faire fissa)… mais un jour le patient “habitué de l’OAP”, connu mais pas de tous a appelé trop tard et les confrères de garde sont arrivés trop tard… Pauvre Naomi qui n’a pu “convaincre” de la réalité de son mal. Pauvre régulatrice qui s’en voudra toute sa vie. (Après avoir été sans doute débordée de trop d’appels “bidon”…).

[Commentaire publié en réaction à l’article “La régulation me fait haïr les gens” : le coup de gueule d’un urgentiste]

 

“Morte car elle avait une pathologie qui a causé sa mort”

Par terrassejf

En plus cette personne est morte car elle avait une pathologie qui a causé sa mort, il ne faudrait pas oublier qu’elle n’est pas décédée du fait de la réponse du service d’urgence.

Pour l’arm la plainte n’était pas suffisamment précise et l’orientation vers Sos Médecins a été faite correctement. La suite des événements n’est en rien de sa responsabilité. Dans notre société on voudrait qu’un téléphone sauve toutes les vies, c’est de l’incantation, il y aura toujours des morts.

[Commentaire publié en réaction à l’article “La régulation me fait haïr les gens” : le coup de gueule d’un urgentiste]

 

“Pénaliser les gens pour de faux appels”

Par Christine_D_2

La première chose serait de pénaliser les gens pour de faux appels et des appels mensongers : le coût de l’intervention devrait être à leur charge.

Témoignage tellement vrai, mais quand on est planqué dans un bureau et ce uniquement aux heures ouvrables, c’est facile de gueuler et de critiquer.

J’ai beaucoup de compassion pour la Parm qui a un décès sur la conscience, et je lui trouve beaucoup de circonstances atténuantes.

Par contre, j’ai peur que le décès de la pauvre Noémie ne serve qu’à vilipender un peu plus les soignants, et pas du tout à ce que les ronds-de-cuir se posent les bonnes questions et à y remédient afin d’éviter que ce type de drame se reproduise.

Saluons au passage l’appel au calme des frères.

[Commentaire publié en réaction à l’article “La régulation me fait haïr les gens” : le coup de gueule d’un urgentiste]

 

“Facturer les appels puis la consultation avec un médecin”

Par lolb75

La meilleure façon de réguler les abus des appels au SAMU et de sélectionner les vraies urgences est de facturer les appels puis la consultation avec un médecin régulateur.

Le problème serait réglé en quelques mois et les urgences traitées dans les délais. Idem pour le service des urgences. C’est ce qui se fait dans de nombreux pays.

On vous demande votre carte vitale ou équivalent et votre carte bancaire à votre arrivée. Votre présence aux urgences est justifiée et vous n’attendez pas des heures. Le sujet est tabou mais voilà les conséquences de la gratuité de notre système de soins.

[Commentaire publié en réaction à l’article “La régulation me fait haïr les gens” : le coup de gueule d’un urgentiste]

 

“Notre profession est incapable d’évoluer, arcboutée sur ses certitudes”

Par thomaspg

Effectivement arrêtons de comparer, dire que l’on était plus nombreux sur le plan mathématique c’est de la foutaise ! Ainsi en 2001 il y avait 196 000 médecins en activité aujourd’hui 226 000 ! En 1970 la densité médicale était de 130 médecins pour 100 000 habitants et en 2001 de 330 !!!

Le problème du manque de médecins ne vient pas que du nombre loin de là, il y a eu une évolution, (comme dans toute la société) lorsque j’ai commencé à exercer (en tant que militaire) nous étions de service le samedi matin ! (Le samedi après-midi libre venait tout juste d’arriver et croyez-moi quel plaisir !) Lorsque j’ai quitté l’armée en 2002 nous avions le vendredi après-midi de libre (en plus du samedi RTT obligent…) Lorsque j’ai commencé, dans nos groupes de formation continue plus d’un d’entre nous était appelé par un patient durant la réunion (je parle de mes confrères civils) et bien entendu se déplaçait, en 2002 je n’ai pas souvenir de tels dérangements (la “permanence des soins était passée par là de même que la retape des services de porte des hôpitaux ! car la surcharge a elle aussi été organisée, que voulez-vous prendre la TA du petit vieux qui passe la porte cela faisait du chiffre, les gens ont pris l’habitude!) les patients étaient-ils plus agréables ? Sans doute quoique !

Lors de remplacements fin 70 début 80 à la cité lumineuse de Bordeaux dans des appartements avec l’électroménager “dernier cri de l’époque” on avait déjà droit au “J’y ai droit” et aux exigences moins mais quand même il n’y avait pas de CMU, il n’y avait pas “d’assistanat” mais déjà parfois… quant aux hôpitaux dans les services nous avions déjà affaire à des patients exigeants et je ne parle pas de patients venant de groupes nomades dont le comportement laissait à désirer

Le vrai problème est que notre profession est incapable d’évoluer arcboutée sur ses certitudes (comme d’ailleurs les autres professions de santé) chacun défendant sa guérite ! Nombre de nos taches pourraient être faites par des infirmiers d’ailleurs travaillant sur l’étranger c’est ce qui se fait chez les Anglo-saxons et que je sache la mortalité n’est pas plus élevée !  Le vrai problème est (et je ne nous jette pas la pierre) dans une société où les salaries sont pour majorité aux 35 heures (ou même 40) il est difficile de demander aux libéraux de travailler 60 le différentiel est trop grand ! Autrement dit un ETP (équivalent temps plein) de médecin de 2018 est très nettement inférieur à celui d’un médecin de 1980 ! et c’est de la simple arithmétique paradoxalement les 35 heures qui n’ont créé de travail pour les salariés qu’à la marge ont été une catastrophe dans les hôpitaux qui n’ont pas les moyens d’embaucher (des infirmiers) les libéraux ont pour la majorité d’entre eux levé le pied, quant aux jeunes civilisation actuelle oblige, ils ne voient pas pourquoi ils ne bénéficieraient pas de leur nuits et week-end lorsqu’ils sont en libéral (et je ne leur jetterai pas la pierre,) à cela s’ajoute le nombre de confrères à exercice particulier acupuncture, homéopathie etc.. Le nombre de confrères à mi-temps, 3/4 de temps etc. fait que la pénurie est non pas due au numerus clausus qui a été compensé par les médecins à diplôme étranger (11,8%) mais à ce mode de vie le numerus clausus n’a fait qu’aggraver la situation, le vrai problème est ailleurs en 1980 (je crois) 50% des diplômés s’installaient généralistes, de nos jours c’est nettement moins, l’Ideal c’est le salariat. (Cela peut se comprendre)

Arrêtez de comparer les époques et d’opposer les “jeunes aux vieux”, les vieux de mon temps car on est toujours le vieux C. d’un jeune ou le jeune C. d’un vieux et avec l’Age on passe d’une catégorie à l’autre sans s’en rendre compte ! C’était toujours mieux de mon temps et pour un jeune c’est toujours plus difficile par rapport aux vieux cette litanie elle était déjà d’actualité au temps de César!

[Commentaire publié en réaction à l’article Travailler plus pour absorber les urgences : l’idée qui scandalise les généralistes]

 

“La bonne vieille époque où vous partiez aux Seychelles aux frais des labos”

Par Frederic

Je ne commente pas l’article, il me désole comme certains des commentaires ci-dessous.

Ceux qui ont tout vu tout fait quand tout marchait tellement mieux qu’avant alors je leur pose comme question à tous ces donneurs de leçons : expliquez-moi pourquoi les urgences des autres pays ne font pas mieux que nous ? Expliquez-moi par exemple pourquoi en Angleterre par exemple où vous ne pouvez rien faire sans avoir vu l’aval de votre médecin généraliste de votre quartier il y a minimum 6 h d’attente voire jusqu’à 12 heures d’attente il y a encore quelques mois ?

Les médecins anglais comme le personnel médical sont aussi des grandes feignasses comme vous le prétendez des médecins généralistes français ? Vous qui faisiez 70 heures par semaine gardes etc. ? Alors arrêtez vos conneries de vieux cons profitez de votre retraite dorée qu’on est en train de vous payer et ne nous cassez pas les bonbons. Réunissez-vous entre vous et trinquez à la bonne vieille époque où les cloches de l’église sonnaient, que les élèves se levaient devant le maître en blouse grise que bobonne s’occupait de la maison et que vous partiez aux Seychelles aux frais des labos. Profitez bien de votre retraite vous les derniers survivants d’un monde qui n’existe plus et oui il faut s’y résigner. Profitez bien, beaucoup de vos collègues sont morts en montant cet escalier à 22 h éreintés d’avoir trop travaillés.

Vous avez tout le temps de réfléchir au nombre stable d’actes moyens d’un MG qui de 6500 actes par an. De l’espérance de vie qui augmente des progrès médicaux des pathologies cancéreuses en traitement. De la prise en charge des préventions.

Et oui le monde change il évolue et c’est sans vous, il n’y a que le musée Grévin qui ne change pas.

J’espère que ce petit billet va me faire le plus grand nombre de votes rouges ! Ça prouvera que le nombre de médecins retraités ou à devenir est bien plus nombreux que ceux qui travaillent pour la médecine de demain.

Signé un médecin généraliste fainéant et donc jeune con.

[Commentaire publié en réaction à l’article Travailler plus pour absorber les urgences : l’idée qui scandalise les généralistes]

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : F. Na

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