La transplantation fécale dont les modalités techniques de réalisation commencent à être fixées est une alternative efficace en cas d’infection récidivante rebelle à Clostridium difficile.

 

Le microbiote intestinal est constitué par des milliards de micro-organismes (bactéries, virus, levures, parasites, archéobactéries…) non pathogènes qui colonisent le tube digestif. Il sʼagit dʼun écosystème complexe, spécifique à chaque individu.

Son altération quantitative et/ou qualitative, appelée dysbiose, a été observée dans de nombreuses situations pathologiques (maladies digestives notamment). La transplantation de microbiote fécal (TMF) consiste à transférer des selles dʼun donneur sain dans le tube digestif dʼun patient receveur pour rééquilibrer sa flore intestinale.

La première Journée du Groupe français de transplantation fécale (GFTF) a été organisée le 16 juin à Paris à l’hôpital Cochin. Elle a réuni pour la première fois en France, des chercheurs, des médecins et des pharmaciens.  Des études dans la vraie vie avec plusieurs centaines de cas valident l’expérience française, en confirmant l’efficacité de la TMF dans l’infection à Clostridium difficile, une bactérie anaérobie, responsable de 20-25 % des diarrhées associées à l’antibiothérapie, de 10 % des diarrhées liées aux soins, et des colites pseudomembraneuses.  Une enquête auprès de vingt centres hospitaliers confirme un taux de réussite de 90%. Ce travail a colligé les pratiques propres à chaque centre pour favoriser une homogénéisation future des pratiques.

 

Les éventuelles complications à long terme ne sont pas connues

Quarante études sont actuellement en cours dans le monde pour évaluer l’efficacité de la TMF dans d’autres pathologies. Deux essais randomisés contrôlés (Lancet, 2017) ont montré 30 % d’efficacité dans le traitement de la rectocolite hémorragique. Mais, les perspectives ouvertes par les études sur l’animal ne permettent pas encore d’extrapoler les résultats à l’homme. Les spécialistes ne connaissent pas tous les mécanismes expliquant cette efficacité et  si cela repose sur certaines bactéries ou sur un ensemble de bactéries. Les éventuelles complications à long terme ne sont pas connues, mais un registre français a été créé par le GFTF.

Le contexte réglementaire est particulier. Le microbiote intestinal nʼa pas de statut juridique en droit français. En mars 2014, lʼAnsm a retenu celui de médicament. Cela implique que la préparation des selles doit être effectuée sous la responsabilité dʼune pharmacie à usage intérieur (PUI) dʼun établissement de santé. Le texte de lʼAnsm précise uniquement les modalités de réalisation pour la recherche clinique. C’est pourquoi des recommandations ont été proposées afin d’harmoniser et de sécuriser la TMF pour les indications déjà reconnues (actuellement uniquement les infections récidivantes à Clostridium difficile), car les recommandations de l’ANSM ne concernent que la recherche ; de plus, elles n’encadrent pas le traitement des colites à clostridium difficile à répétition alors que c’est de loin la principale indication avec quasiment 1 000 cas décrits dans la littérature médicale.

 

La forme par voie orale est donc un vrai progrès

Cette journée a été l’occasion de présenter une innovation majeure au service du patient, avec des capsules à double enveloppe et gastro-protégées pour remplacer les méthodes actuelles de TMF : par sonde naso-duodénale ou gastrique, par lavement (nécessitant un contrôle sphinctérien) ou coloscopie. La forme par voie orale est donc un vrai progrès. Les capsules sont d’ores et déjà à la disposition des médecins.  La maîtrise de la technologie validée par l’essai européen R- Gnosis permet désormais de développer leur fabrication dans les laboratoires de coprologie des services de pharmacie hospitaliers. Deux sites pilote d’expérimentation clinique ont été mis sur pied, à l’hôpital Beaujon (Clichy) et à Antoine Béclère (Clamart).

A l’issue de cette journée, le GFTF souhaite développer une logistique apte à permettre un accès à la TMF partout en France et informer les professionnels de santé de l’intérêt de ce traitement.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Dr Philippe Massol

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