Et s’ils avaient enfin trouvé la solution contre les déserts médicaux… Karine Zaouche, Charlotte Lajoux et Aymeric Du Mesnil sont en train de mettre au point le site merci-doc.com. Cette start-up, lauréate des trophées des services innovants entend nouer des partenariats avec les communes en mal de médecin. Elle leur propose de leur envoyer, une fois par semaine un généraliste en secteur 1. Communes et médecins se sont déjà montrés intéressés par le projet. Le service devrait être effectif dans le courant de l’année.

Egora : Que propose merci-doc.com?

Karine Zaouche : Merci Docteur est une solution pour lutter contre les déserts médicaux. L’idée est de mettre en place un dispositif de consultations de médecine générale, à temps partiel, dans les déserts médicaux. Pour cela, nous nous appuyons sur un réseau de médecins volontaires aux alentours, résidants à une heure maximum de chaque commune dans laquelle ils interviendront. Les praticiens disponibles viendraient un jour par semaine, en fonction des besoins des territoires, pour consulter dans un espace dédié, proposé par la commune.

Concrètement, comment cela va-t-il se dérouler ?

Karine Zaouche : Concrètement, nous nouons un partenariat avec une mairie qui nous met à disposition une salle. Nous nous chargeons de mettre aux normes cette salle afin qu’elle réponde à notre charte éthique. Puis nous créons un binôme ou un trinôme de médecins généralistes qui vivent aux alentours, à une heure maximum de trajet. Les médecins se répartissent alors les consultations hebdomadaires.

Charlotte Lajoux : Dans notre offre, les médecins travaillent à leur rythme habituel, touchent leur honoraires (nous ne touchons absolument rien sur ces honoraires) et nous leur reversons une indemnité supplémentaire. En plus de cela, nous gérons pour eux l’ensemble des démarches administratives pour obtenir les autorisations d’exercice. Le but n’est donc pas du tout de les faire travailler plus, au contraire, c’est vraiment de les aider à avoir plus de temps passé auprès du patient.

Comment est née l’idée ?

Karine Zaouche : Nous sommes trois consommateurs issus du monde de la santé. Nous travaillons beaucoup dans le conseil en santé, notamment avec les hôpitaux dont certains sont déjà dans des déserts médicaux. On se rendait compte que le problème de la démographie médicale empirait d’année en année. D’où l’idée de créer une solution qui participe à l’allégement de ce phénomène. Nous avons réalisé qu’il n’y avait pas de solutions liées au temps partiel qui soient fonctionnelles et duplicables partout en France. Nous pensons pourtant que toutes les petites villes n’ont pas forcément besoin d’un médecin à temps plein sur place. Nous voulons promouvoir un autre modèle, celui d’un médecin qui vient un à deux jours par semaine en fonction de la taille de la ville.

Qui seraient les médecins intéressés par ce concept ?

Charlotte Lajoux : Il s’agit de médecins libéraux installés dans des cabinets de ville. Il y a plusieurs profils de médecins intéressés. Cela peut être soit des médecins assez jeunes qui viennent de s’installer et qui veulent diversifier leur activité pour ne pas être 5 jours sur 5 dans leur cabinet. Des médecins qui ont envie d’exercer avec des modalités de travail innovantes. Les médecins proches de la retraite ou retraités sont un autre profil de médecins intéressés.

Les remplaçants ne peuvent pas participer à ce projet ?

Charlotte Lajoux : La difficulté de faire venir des remplaçants est qu’il n’y aura pas de médecins à remplacer. Si la réglementation le permettait, les remplaçants seraient une population qui pourrait vraiment être intéressée. D’ailleurs l’idée de créer ce projet est aussi lié au fait que la réglementation a bougé il y a peu de temps*. Du coup nous voulions miser là-dessus. Maintenant il est possible d’avoir un autre lieu d’exercice dans la mesure où cela ne porte pas concurrence et que c’est dans un désert médical.

Comment cela va fonctionner d’un point de vue financier ?

Charlotte Lajoux : Nous nous appuyons sur des dispositifs de financement régionaux et/ou ARS. Nous comptons sur des financements publics d’une part et sur le client d’autre part. Le client est l’entité qui demande à ce que le médecin vienne. Aujourd’hui il s’agit de communes, demain cela pourra être des entreprises privées qui ont besoin d’avoir un médecin de temps en temps. Cela peut aussi être un Ehpad.

Les médecins seront payés comment ?

Charlotte Lajoux : Les médecins, qui seront tous en secteur 1 seront payés par leurs honoraires. Nous leur réglerons également une indemnisation. L’idée est que ce complément puisse couvrir à la fois la perte de patients liée au temps de trajet et une partie de leurs charges fixes au cabinet. Nous voulons que l’opération soit neutre, voire un peu positive pour le médecin.

Combien de médecins se sont déjà montrés intéressés ?

Charlotte Lajoux : Nous avons sur toute la France 25 à 30 médecins intéressés. Aujourd’hui nous nous adressons aux généralistes mais nous avons quelques spécialistes qui ont manifestés de l’intérêt. Nous avons donc 25 généralistes et 5 spécialistes. Dans un second temps, nous aimerions aussi faire venir des spécialistes.

Quelle est la date de lancement de votre service ?

Charlotte Lajoux : Nous aimerons sortir avant l’été.  Nous avons un partenariat avec une commune en Bretagne. D’ici un à deux mois nous allons démarrer une première phase de test. Nous sommes susceptibles d’avoir 10 communes pour l’année 2017.

Les 25 généralistes intéressés gravitent-ils autour de ces 10 communes ?

Charlotte Lajoux : Malheureusement non. Ils sont répartis sur toute la France.  Nous ne sommes pas encore assez gros pour faire coïncider les volontés des médecins et celles des maires mais nous travaillons dessus. Nous sommes déjà en train de chercher des généralistes en Bretagne. Nous avons bon espoir de les trouver.

*Option santé solidarité territoriale dans le cadre de la dernière convention médicale.

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin

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