En savoir plus sur les jeunes médecins généralistes remplaçants… C’est ce que nous propose Alexandre Husson, président du syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) dans sa thèse soutenue le 23 mai dernier. D’après le jeune docteur, les mesures incitatives à l’installation ne fonctionneront pas. C’est tout le système économique qui entoure la médecine générale qu’il faut revoir. Il propose la création du poste d’assistant généraliste, pour libérer du temps aux médecins.

 

“Les mesures incitatives censées favoriser l’installation des jeunes ne fonctionneront pas. On ne fait pas un choix de vie et de carrière sur quelques milliers d’euros ”. A l’occasion de sa thèse  intitulée “Le jeune médecin généraliste remplaçant en France : éternellement nomade ?” Alexandre Husson, s’est précisément intéressé aux aspirations des nouvelles générations. Il en ressort que le temps libre figure parmi leurs priorités. “L’importance du temps libre est un nouveau phénomène, cher aux jeunes médecins. C’est une des raisons pour laquelle ils délaissent l’exercice libéral de la médecine générale” explique-t-il. En effet, parmi les trois principaux motifs de satisfaction liés à l’activité de remplaçants, figurent dans l’ordre, l’absence de contraintes administratives (70% des répondants), le choix de l’emploi du temps (60%) et le temps libre (40%). “Les contraintes administratives citées en première position sont considérées comme chronophages. C’est vécu comme du temps libre investi gratuitement ” résume Alexandre Husson.

 

Dépoussiérer le métier

Les nouveaux venus dans la profession veulent en effet dépoussiérer le métier de généraliste. “Ils ne souhaitent plus travailler 50 à 60 heures par semaine, comme cela était le cas avant” déclare le jeune docteur avant d’ajouter “ils ne veulent plus être prisonnier de leur métier et de leur patientèle. D’autant que l’absence d’évolution de carrière est angoissante pour médecin qui débute”. La plupart des praticiens interrogés par Alexandre Husson trouvent donc acceptable de travailler entre 39 et 45 heures par semaine.

Selon lui, “c’est tout le modèle économique du généraliste en secteur 1 qui est à revoir”. Il apparait en effet que le chiffre d’affaire des MG plafonnent à partir de la douzième année d’exercice, car au-delà  de 12 ans, l’activité a tendance à baisser. “Les médecins qui sortent de la faculté sont très bien formés, mais le modèle économique qu’on leur propose, hérité du siècle dernier ne convient plus” décrypte le thésard. “Les MG formés actuellement sont de catégorie supérieure et ils sont rémunérés au tarif d’une catégorie intermédiaire” constate-t-il.

C’est pourquoi le ratio salaire / temps libre est l’atout principal de la médecine salariée, qui séduit de plus en plus de jeunes. Un médecin salarié gagne un salaire inférieur à celui d’un médecin libéral, en revanche, son taux horaire est nettement supérieur : 40 euros nets de l’heure pour un médecin salarié, contre 25 à 28 pour un praticien libéral. “Cet investissement en temps n’est plus rentable pour les généralistes. La féminisation de la profession fait que les jeunes femmes médecins privilégient leur vie de famille à leur carrière. Ce n’est pas un manque d’engagement mais plutôt un phénomène sociétal qu’on ne peut nier” juge-t-il.

 

Intermédiaire

Pour Alexandre Husson, c’est donc tout le mode d’organisation de la profession de médecin généraliste qui doit changer pour pouvoir ré-attirer l’installation des jeunes. Il constate d’ailleurs que l’évolution du nombre de médecins remplaçants coïncide avec l’instauration du stage obligatoire chez le médecin généraliste. “En découvrant le quotidien du MG qui n’a pas de temps libre, cela a eu un effet repoussoir chez les stagiaires” analyse-t-il.

L’auteur de la thèse a donc réfléchi à une solution pour redonner envie aux jeunes. Il propose la création d’un poste d’assistant généraliste,  salarié sous la responsabilité des MG. “Ce métier serait un intermédiaire entre infirmier et secrétaire médical. Ils auraient en charge la gestion administrative associée à une activité clinique, comme la prise de tension par exemple. Une aide qui serait similaire à celle de l’assistant dentiste ou de l’infirmier anesthésiste” estime-t-il. Ce qui pourrait libérer du temps libre aux médecins généralistes, payés à l’acte ou salariés. Ces assistants seraient payés par les médecins généralistes qui bénéficieraient d’aides. “On finance des maisons disciplinaires mais elles restent vides. Une partie de leur budget pourrait aider à payer ces assistants. Idem pour les mesures incitatives qui ne fonctionnent pas et dont les coûts pourraient être réalloués”.

Bien qu’Alexandre Husson ne croie pas à l’efficacité  des mesures incitatives, le résultat de son étude pousse à l’optimisme quant aux futures installations des jeunes. Il relève en effet qu’il n’y a pas de vraie professionnalisation du rôle de remplaçant : au contraire, les trois quart des répondants souhaitent s’installer en libéral,  45% dans moins de trois ans et 65% dans moins de 5 ans. Le praticien contredit ainsi l’analyse des chiffres donnée par l’Ordre. “Depuis 2007, ils nous disent qu’il y a trop de remplaçants alors que la proportion est stable voire en baisse parmi les jeunes” s’emporte-t-il. Il regrette en effet que l’Ordre comptabilise de la même manière les remplaçants retraités (en augmentation) et les jeunes (en diminution). “Ils publient tous les chiffres, mais mettent l’accent sur ce qui les arrangent. Lorsqu’on voit les dernières propositions de l’Ordre, on se demande s’il n’y a pas une volonté d’influencer le pouvoir politique” s’interroge Alexandre Husson.

 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi